Passages : Se battre avec son ombre
Avec Passages, l’auteure et comédienne Catherine Dajczman s’adonne à une introspection qui manque de substance et d’originalité.
Depuis sa sortie de l’école en 2001, Catherine Dajczman n’a pas chômé. Elle a joué, surtout à la télévision, écrit une première pièce, Passages, et fondé NU, sa propre compagnie. Après avoir été plusieurs fois mise en lecture, Passages est créée ces jours-ci dans une mise en scène sobre mais sommaire de Marcel Pomerlo. Pour défendre ce monologue autofictionnel verbeux et inconsistant, parfois même pompeux et narcissique, nulle autre que son auteure.
Sur un plateau recouvert de tissu – une évocation des déserts du Nevada où l’héroïne expérimente une quête de vision -, on trouve une table, une chaise, un fauteuil, quelques roches et, dans le coin droit, un amoncellement d’objets usuels. Pendant une heure qui paraît interminable, la comédienne (c’est-à-dire le personnage, qui précisons-le porte le même nom) raconte son mal de vivre et sa soif de comprendre d’où celui-ci provient. Pourtant, elle a tout pour être heureuse.
Mais, comme les bons sentiments, c’est bien connu, ne font pas de bonne littérature ni de bon théâtre, la jeune femme se lance, après une rupture amoureuse particulièrement difficile (!), dans une quête spirituelle alambiquée, une démarche qu’elle nous expose par le menu avec une intensité et un sens de la dérision d’abord sympathiques puis insupportables. Malgré tous ces efforts, le spectateur ne sera jamais convaincu du bien-fondé de l’entreprise, artistique aussi bien que personnelle, d’ailleurs.
Le jeu et le phrasé de Dajczman n’est pas sans rappeler le style de Pol Pelletier, un mimétisme qui est ici plus agaçant qu’autre chose. Son texte, surtout à partir du moment où l’héroïne comprend que sa souffrance provient des malheurs vécus depuis plusieurs générations par les membres de sa famille paternelle, évoque – avec beaucoup moins d’ampleur et de résonances, faut-il le préciser? – les sagas de Wajdi Mouawad, principalement Forêts.
Au terme de cette bataille avec elle-même et ses racines, la jeune femme semble transfigurée. L’art semble avoir eu sur elle des vertus thérapeutiques. Malheureusement, cette béatitude ne nous est pas communiquée.
À voir si vous aimez /
Visage retrouvé, de Wajdi Mouawad, dans une mise en scène de Marcel Pomerlo, et Aïe, mes aïeux!, l’essai d’Anne Ancelin Schützenberger