Charles et Berthin : Les amours impossibles
Scène

Charles et Berthin : Les amours impossibles

Qui aime, qui est aimé? Les angles du triangle amoureux de la pièce Charles et Berthin se réfléchissent et s’emmêlent, tranchants.

Dans les coulisses d’un théâtre du 18e siècle, des intrigues se tissent. Il y a Marie (Émilie Jean), celle qui voudrait bien faire partie de la troupe, amoureuse par dépit et fort insatisfaite. Dans son lit, Charles (Christian Ouellet) le torturé qui pensait bien avoir réussi à dompter ses élans. C’était avant que ne revienne comme un fantôme Berthin (Guillaume Ouellet), parti sans donner de nouvelles pour un long périple en Nouvelle-France. Trois mille jours outre-mer, c’était juste assez pour rêver d’un monde meilleur, là où peut-être la différence serait admise, où les hommes pourraient sans contrainte "passer de l’amitié jusqu’à l’amour", comme le chante Richard Desjardins. Et au-dessus de cette faune qu’elle semble surplomber, Catherine (l’excellente Josée Laporte), comédienne qui est au fait de toutes les histoires – est-ce un hasard si elle joue la cartomancienne?

Le texte de Stéphan Cloutier, particulièrement intéressant par sa structure – il nous présente à rebours, à la façon du fameux film Memento (Christopher Nolan), les événements qui ont précédé le retour de Berthin -, manque toutefois sa chute, laissant le spectateur perplexe. En fait, ce qui rendra le texte pertinent, c’est surtout la façon dont il aborde les moeurs qui prévalaient sous Louis XIV.

Ceux qui craindraient d’être choqués devant une passion homosexuelle qui serait exhibée sur scène peuvent se rassurer, car même si le triangle amoureux a été légèrement reconfiguré pour cette histoire, jamais le propos ni le geste ne sont véritablement déplacés. Bien sûr, c’est un théâtre de l’intime, et la peau des hommes se touche parfois, éclairée à la flamme vacillante du bougeoir. Or, au final, on retient qu’il jette plutôt son éclairage sur les amours impossibles que sur l’amour du même sexe.

À voir si vous aimez /
Molière, Lomer de Richard Desjardins