Emmanuel Jouthe : Danse climatique
Scène

Emmanuel Jouthe : Danse climatique

Emmanuel Jouthe remonte la 20 pour offrir en première aux gens de la capitale son nouveau-né, Cinq Humeurs, construit d’après Les Quatre Saisons de Vivaldi… et la cinquième. Regard sur le temps à venir.

Joint la semaine dernière au téléphone, le chorégraphe Emmanuel Jouthe ne cachait pas sa nervosité à l’idée de venir présenter, en première et hors de son bassin montréalais, sa nouvelle création Cinq Humeurs à Québec. Il faut dire qu’il ne s’est pas donné la tâche facile. En plus de s’attaquer à l’oeuvre monumentale que sont Les Quatre Saisons de Vivaldi – qu’il dit admirer pour "sa texture, ses mouvements exubérants, sensuels, passionnés, qui témoignent de l’époque baroque" -, il a aussi eu l’idée d’en rajouter une cinquième, saison, qu’il a chorégraphiée cinq fois, avec la relève professionnelle de cinq villes différentes (Rimouski, Ottawa, Sherbrooke, Montréal et Québec), rien de moins! Pour la musique, il a sélectionné trois mouvements parmi d’autres oeuvres du compositeur.

Dans cette envie de créer avec les diplômés des écoles de danse de ces villes – l’École de danse de Québec, dans le cas qui nous intéresse -, le chorégraphe et danseur voit la suite logique de son cheminement, lui qui a été amené très tôt dans sa carrière à travailler avec la relève: "J’ai pris plaisir à développer ma danse autant sur la scène qu’en communiquant avec les jeunes. Et à un moment donné, je me suis dit: "Est-ce qu’il est possible pour moi, au sein de ma compagnie [Danse Carpe Diem], de faire cette rencontre?"" Une rencontre qui fut différente pour chaque ville: "La cinquième saison n’est pas la même d’une ville à l’autre, car mon inspiration première, c’est d’abord les danseurs. Chaque fois, j’ai dû trouver notre territoire d’entente."

Résultat, une oeuvre à géométrie variable selon son lieu de présentation. Pour le contenu chorégraphique des Quatre Saisons proprement dites – pièce pour six interprètes, dont deux de Québec, Mélanie Therrien et Sonia Montmigny, que Jouthe a recrutées -, nulle variation d’une ville à l’autre, mais une proposition qui risque d’en dérouter plus d’un. D’où le stress. Le chorégraphe explique: "Au départ, j’ai commencé à créer tout en emphase, en réponse à la musique, mais ça ne marchait pas du tout… Il a fallu que je me rétracte, que j’écoute la musique différemment. Sincèrement, ça m’a stressé et ça m’angoisse encore!"

Malgré ses appréhensions, le créateur assume sa prise de position, qui fait le pari de la lenteur sur une musique explosive. "Par respect pour cette oeuvre, je n’ai pas voulu barbouiller par-dessus, mais plutôt offrir aux danseurs et aux spectateurs un temps, un climat, des images d’abord et avant tout. Je propose un corps minimal plutôt qu’un corps exubérant, qui suggère une écoute différente de la musique. Le corps sur scène n’est pas en train de répéter ou de renchérir… C’est pour ça que j’aime mieux parler d’un climat chorégraphique."

Le chorégraphe nous donne donc rendez-vous à Québec, et ce, peu importe le temps qu’il fera…