Olivier Lépine : L'île au mystère
Scène

Olivier Lépine : L’île au mystère

Olivier Lépine a été choisi par Les Écornifleuses pour mettre en scène leur première création: Barbe Bleue et la maison dans la forêt s’est allumée. Enquête.

L’an dernier, Les Écornifleuses ont fait leur marque en montant Cinq filles avec la même robe. Elles nous offrent à présent leur première création, Barbe Bleue et la maison dans la forêt s’est allumée, imaginée par toute l’équipe, mais écrite par Édith Patenaude. La pièce met en parallèle un interrogatoire et les faits auxquels on y fait référence, c’est-à-dire des événements survenus pendant les huit jours de vacances d’un groupe d’amis dans un chalet sur une île isolée…

La prémisse a beau rappeler celle de plusieurs films d’horreur, le traitement, lui, se fait résolument théâtral. Il repose entre autres sur la richesse des différents points de vue, alors que les souvenirs de chacun dépendent de leurs motivations et de perceptions parfois biaisées par l’alcool ou un imaginaire s’emballant sous l’effet de l’isolement. "Ça demeure très suggéré et il n’y a pas beaucoup de jeu réaliste", observe Olivier Lépine.

En fait, les seuls passages plus quotidiens se déroulent dans l’île. "Il faut toujours donner l’impression qu’il y a une deuxième couche derrière ce qui est dit, précise-t-il à ce sujet. Dans ces conditions particulières, les liens de confiance sont mis à l’épreuve, la vraie personnalité des gens ressort." Quant aux témoignages, ils tiennent de la partition bien réglée, tandis que certaines scènes charnières prennent la forme de tableaux vivants.

De manière générale, le metteur en scène a opté pour le dépouillement; il jette un pont entre présent et passé en faisant jouer les flash-back dans les habits du procès et témoigner les personnages les pieds dans la terre. Sinon, on ne retrouve sur scène que quelques chaises et pièces à conviction. Mais c’est sans compter l’imposante distribution de 11 comédiens, qui y sont presque constamment rassemblés. Ajoutez à cela un texte fragmenté et vous aurez une idée de l’imposant travail d’orchestration auquel il a dû se livrer.

Mais quel rapport avec Barbe Bleue, cet ogre dont les épouses disparaissaient sans explication? "On voulait explorer le mystère, l’angoisse sur scène", explique Valérie Marquis, assistante à la mise en scène, quant au choix de s’inspirer du conte de Perrault. "Dans Barbe Bleue, on sent que les femmes savent qu’elles vont mourir, mais que l’attrait pour le mystère est plus fort que leur raison", commente Olivier, avant d’ajouter que le propriétaire de l’île exerce le même genre de magnétisme sur les personnages.

Sans toutefois oser la comparaison, Olivier Lépine croit que Barbe Bleue…, dans la lignée des Agatha Christie et Columbo, "peut faire passer une belle soirée aux gens qui ont envie d’être étonnés, d’embarquer dans une histoire". "En même temps, je pense qu’il y a là un questionnement sur la responsabilité et le rapport à la vérité, au mensonge", note-t-il. Une chose est certaine, ce spectacle se situe à mille lieues de Cinq filles… N’empêche, il plaira certainement à ceux qui ont été séduits par l’énergie des Écornifleuses.