Zhang Dandan : Génie féminin
Invitée par Les Grands Ballets Canadiens de Montréal, Zhang Dandan débarque à Montréal avec le Ballet de Guangzhou pour présenter La Sylphide, oeuvre qui marqua l’avènement du ballet romantique.
Ancienne étoile du Ballet Central de Chine, Zhang Dandan est retournée dans sa ville natale en 1994 pour y fonder le Ballet de Guangzhou, l’une des cinq compagnies de ballet de l’Empire du Milieu. Interviewée par courriel, la directrice artistique et administrative de la troupe, également maîtresse de ballet, mentor et danseuse à ses heures, se montre peu loquace. À la question du choix d’intégrer La Sylphide à son répertoire, elle répond que le style est unique, les difficultés techniques, très exigeantes pour ses danseurs, et l’histoire et le décor, particulièrement intéressants. "La majorité des publics, en Chine et à l’étranger, aiment ce programme, commente-t-elle. Or, la plupart des compagnies qui le dansent sont danoises. Notre version dure environ une heure et est moins difficile que la version française."
Avec des choix comme celui-ci, Dandan opère une forme de révolution dans son pays où le ballet classique occidental n’a pas encore réussi à bien percer le marché du spectacle. Il faut dire qu’il n’est autorisé que depuis une soixantaine d’années et qu’il correspond peu aux valeurs et références culturelles locales. C’est pourquoi Dandan commande des oeuvres qui croisent ballet occidental et traditions chinoises, et qu’elle reprend des classiques en pratiquant des tarifs d’entrée très bas pour encourager le public à venir les découvrir. C’est donc ainsi qu’en 2007, elle a remonté La Sylphide que le Français Pierre Lacotte avait lui-même reconstituée pour l’Opéra de Paris au début des années 70 à partir des documents originaux datant de 1832 du chorégraphe Filippo Taglioni.
Ballet-pantomime en deux actes et trois tableaux, ce premier grand ballet romantique raconte l’histoire de James, un jeune Écossais qui s’éprend d’une sylphide la veille de son mariage. Une diseuse de bonne aventure dévoile ses véritables sentiments à sa fiancée, lui prédisant au passage qu’elle en épousera un autre. Furieux, le jeune homme la chasse sans savoir qu’elle est sorcière et qu’elle oeuvrera plus tard à sa perte. Dans la forêt où il poursuivra la sylphide le jour même de ses noces, la sorcière lui offrira une écharpe censée retenir la créature surnaturelle mais qui, en réalité, la tuera.
La principale innovation de cette oeuvre est l’apparition d’éléments fantastiques dans le livret à travers les sylphides et les sorcières, qui caractérisent respectivement les aspirations et les angoisses du héros. Les pointes symboliseront dès lors l’immatérialité et la virtuosité surhumaine et les longs tutus blancs des nymphes donneront à la ballerine sa silhouette emblématique. L’oeuvre est donc une pièce d’anthologie que les amateurs de ballet classique ne manqueront pas de voir ou de revoir.
"Il avait été question que l’on présente Mei Lanfang, mais quand nos hôtes ont vu le DVD de La Sylphide, ils ont changé d’avis", précise Zhang Dandan. Quand on sait que Gradimir Pankov fête son dixième anniversaire à la direction artistique des Grands Ballets Canadiens de Montréal avec une programmation faite de ses coups de coeur et que c’est par Les Sylphides qu’il a eu la piqûre en 1955, on comprend parfaitement son choix.