Coleman Lemieux Compagnie : Le paradis en trois actes
Scène

Coleman Lemieux Compagnie : Le paradis en trois actes

Trio de pièces sélectionnées du réputé chorégraphe James Kudelka, la présentation d’In Paradisum par Coleman Lemieux Compagnie est l’occasion de s’imprégner d’une danse contemporaine littéralement au meilleur de sa forme.

Acclamé de par le monde et encensé par la critique, le spectacle In Paradisum est en tournée depuis quelques années déjà. D’abord conçu en 2006 dans l’optique d’un spectacle combinant danse et musique en direct, son évolution en a fait une véritable brochette des plus belles pièces de l’éminent chorégraphe canadien qu’est James Kudelka. Le programme aujourd’hui exclusivement centré sur la danse est composé de 15 Heterosexual Duets (1991), Soudain, l’hiver dernier (1987) et In Paradisum (1983), trio incontournable pour tout amateur de danse. Cette production pour 11 danseurs séduit par son énergie féroce, son émotion communicative et la variété du ton chorégraphique. Bref, de la danse expansive qui garantit une soirée mémorable.

"C’est un spectacle accessible d’une belle façon", dit Laurence Lemieux, cofondatrice de la compagnie avec son mari Bill Coleman. "Ceux qui commencent à s’intéresser à la danse y trouveront leur compte car ce sont des pièces très physiques, tout en mouvement et très musicales. Il y a beaucoup de points de repère pour le néophyte. Les connaisseurs, quant à eux, peuvent apprécier le haut degré technique des chorégraphies, la musicalité, et reconnaître la signature du chorégraphe."

Technique, complexe et rapide

Fondée en 2000, Coleman Lemieux Compagnie s’est forgé un répertoire hétéroclite qui lui permet d’explorer diverses avenues chorégraphiques. Pièces créées par elle ou par lui, performances in situ dans des environnements urbains ou en pleine nature, intimistes ou à grand déploiement, les univers des deux cofondateurs sont distincts. "Nous sommes très différents des autres compagnies de danse, nous n’avons pas de style précis et facilement identifiable. Nous préférons expérimenter avec diverses possibilités." En 2008, James Kudelka se joint à l’ensemble en qualité de chorégraphe résident. Il adapte certaines de ses pièces pour la compagnie, dont In Paradisum, originellement créée pour Les Grands Ballets Canadiens, en plus d’entamer de nouvelles créations.

Reconnu internationalement comme un chorégraphe novateur et atypique, James Kudelka est l’auteur de créations aux registres très variés. Sa maîtrise du ballet classique autant que de la danse moderne l’a amené à travailler en collaboration avec des danseurs de par le monde mais aussi avec des designers et des musiciens. Son style très technique, complexe et rapide exige beaucoup des danseurs. Graham McKelvie danse In Paradisum depuis maintenant deux ans: "C’est assurément un des grands chorégraphes de notre temps. Il amène les danseurs aux limites de leurs capacités."

Architecture de l’émotion

La première pièce, 15 Heterosexual Duets (1991), met en scène des couples représentant les différentes dynamiques homme/femme. Sur les notes de la Sonate à Kreutzer de Beethoven, chaque duo brille par la personnalité distincte qui émane de chacun des partenariats. De complexe à lyrique, tendre à déchaîné, le tout est un exercice de précision qui en met plein la vue. "Le plus étonnant du travail de James Kudelka, c’est que l’architecture de l’émotion fait partie du mouvement et ne dépend pas d’une performance émotive", ajoute Graham McKelvie. Cette création a remporté un Dora Mavor Moore Award, prix qui récompense annuellement les arts de la scène attribué par le Toronto Alliance for Performing Arts.

Suit Soudain, l’hiver dernier, pièce pour duo masculin d’une rare intensité émotive. Laurence Lemieux avait été touchée par cette pièce, créée à Montréal en 1987, et elle fait partie du spectacle depuis les tout débuts. Chorégraphie s’appuyant sur des gestes simples, l’espace y est laissé aux contrebalancements et aux pauses pour un impact certain, tout en délicatesse.

In Paradisum clôt la représentation avec une performance d’une énergie physique exacerbée, une vigoureuse représentation du processus d’acceptation de la mort avec toute l’anxiété, la douleur et la peine que cela suppose. Dédiée à la mémoire de la mère du chorégraphe, cette pièce a été adaptée pour les danseurs de Coleman Lemieux Compagnie et a été applaudie aux États-Unis, au Brésil, en Chine et en Mongolie. Bien qu’issue d’une période difficile pour Kudelka, elle représente les débuts de sa renommée en Amérique du Nord et le point de départ de plusieurs commandes de diverses compagnies de ballet canadiennes. Le San Francisco Ballet, le Houston Ballet et le Joffrey Ballet, tous de grandes institutions américaines, ont également des pièces de son cru à leur répertoire. Les trois pièces choisies sont, de l’avis de Laurence Lemieux, "le meilleur de trois styles très différents".