Marie-Josée Bastien : À bride abattue
Scène

Marie-Josée Bastien : À bride abattue

Avant de rejouer dans L’Énéide à Espace Libre et de dévoiler sa mise en scène de La Reine Margot au Théâtre Denise-Pelletier, Marie-Josée Bastien nous offre On achève bien les chevaux entre les murs du Quat’Sous.

Écrit en 1935, le roman On achève bien les chevaux a été popularisé, notamment, par le film de Sidney Pollack (1969). Au début des années trente, en pleine crise économique, des concurrents de tout âge et de tout milieu s’affrontent dans un marathon de danse. Le couple gagnant – le dernier à rester debout – mettra la main sur une importante somme d’argent, synonyme, en cette époque de pauvreté et de misère, de survie et d’un peu de dignité.

L’idée de porter à la scène l’oeuvre d’Horace McCoy a mijotée dans l’esprit de Marie-Josée Bastien et de quelques collaborateurs pendant une dizaine d’années. Il y a sept ans, le projet se concrétise: début d’écriture, ateliers d’exploration sur le mouvement et les personnages de cette oeuvre en compagnie de comédiens et du danseur Harold Rhéaume, qui signe les chorégraphies. Le spectacle a été créé à Québec en 2006.

Adaptant le roman de façon assez libre, Bastien choisit de camper l’action à Québec. "J’ai consulté Jacques Lemieux, un historien extraordinaire, j’ai fait de la recherche et j’ai créé des personnages, que j’ai ensuite distribués selon les sensibilités de chaque comédien. Écrire pour du monde, j’adore ça: j’aime, en travaillant, entendre les voix, sentir les énergies de chacun. Et je connais bien tout le monde: ce sont des amis, des collaborateurs, des anciens étudiants."

En cours d’écriture, l’auteure comprend qu’elle doit aussi assumer la mise en scène du spectacle. "En travaillant au texte, j’avais le roman, la musique, le mouvement; j’avais la maquette du décor avec mes petits pions de couleur pour tout le monde. C’était difficile d’imaginer que quelqu’un d’autre fasse la mise en scène; pour moi, l’écriture et la mise en scène, c’est intimement relié, surtout pour ce spectacle. Avec tous ces fils, j’ai fait une petite dentelle…"

D’abord centrée sur le groupe, la pièce se concentre ensuite sur chaque couple, puis sur chaque individu. "Ces personnages sont en mode survie. Au début, c’est le groupe; après, ça se fragmente et ça s’entredéchire. C’est vraiment comme une gang de loups, de loups déguisés, en chemise et en collier. Ça commence lumineux, puis ça s’enfonce dans la nuit; tous les personnages surgissent avec leur drame. C’est comme si on partait d’un plan large, puis on s’en va au gros plan du fin fond de l’oeil de chacun, pour aller ensuite jusqu’au coeur."

Ce qui frappe dans ce spectacle? "Pour moi, c’est l’humanité. L’époque de la crise, c’est un sujet qui me touche beaucoup. Ça m’intéresse de savoir comment les gens vivaient, de connaître les détails de leur quotidien. C’est le genre d’histoires que j’aime entendre. Pendant les répétitions, tout le monde parlait de sa famille, racontait toutes sortes d’histoires, des belles histoires. Avec le spectacle, j’ai l’impression de rendre hommage à toute cette génération-là: c’est la vie extraordinaire du monde ordinaire."

La coproduction du Théâtre Niveau Parking et du Théâtre Les Enfants Terribles met en vedette Emmanuel Bédard, Lorraine Côté, Jean-Michel Déry, Hugues Frenette, Vincent Fafard, Érika Gagnon, Annie LaRochelle, Véronika Makdissi-Warren, Valérie Marquis, Sylvain Perron et Réjean Vallée.