Stacey Christodoulou : Tour de magie
Vous avez dit éclectique? La metteure en scène anglo-montréalaise Stacey Christodoulou propose sa version de Macbeth, en français et en créole, sur fond haïtien de magie et d’atmosphères.
Elle n’a pas l’habitude de monter des classiques, mais Stacey Christodoulou, directrice artistique de l’Other Theatre, raffole de Shakespeare. Difficile de faire autrement quand on est femme de théâtre, qu’on parle la langue du grand Will et que nos chemins ont récemment mené vers le théâtre politique et les textes contemporains à thématiques sociales (comme La Fièvre, de Wallace Shawn, en 2007).
"Ce que j’aime de Macbeth, dit-elle, c’est qu’il est un tyran philosophe. Il se pose de grandes questions sur le pouvoir et l’héritage. Il tue tout le monde autour de lui, mais il a tout à fait conscience des conséquences de chacun des meurtres qu’il commet. On y voit une formidable démonstration des mécanismes du pouvoir et du processus politique."
Chez Macbeth, d’ailleurs, la philosophie et les questionnements existentiels s’accompagnent toujours d’une dimension mystérieuse, de magie et de sorcellerie. S’il s’interroge sur son avenir, il consulte trois sorcières qui font surgir des esprits de leurs chaudrons bouillants. Christodoulou, inspirée par une mise en scène d’Orson Welles dans les années 30 à New York, s’est convaincue que le meilleur contexte où faire revivre cet univers merveilleux était la culture haïtienne, où la magie occupe toujours une place de choix. "Le Macbeth de Welles, explique-t- elle, était grandiose et incroyable, avec plus de 50 acteurs sur scène. Moi, je veux plutôt faire un spectacle intimiste, avec 5 acteurs jouant plusieurs rôles. Ma mise en scène est un peu cérémonielle, mais pas dans le sens d’une sacralisation. Il s’agit plutôt d’une atmosphère qui enveloppe les spectateurs."
Et l’histoire politique tumultueuse d’Haïti dans tout ça? "Je n’ai pas voulu souligner à gros traits les liens entre Macbeth et les dirigeants politiques les plus tyranniques de l’histoire d’Haïti, comme les Duvalier, mais je crois que le parallèle se crée quand même tout seul. On y touche par la bande, sans insister. Évidemment, l’histoire haïtienne m’a beaucoup nourrie en cours de route, elle est demeurée au centre de mes pensées secrètes, en arrière-plan du travail de mise en scène."