Martin Genest : Musique plus
Scène

Martin Genest : Musique plus

Quand Martin Genest s’est intéressé à Gainsbourg, il a pensé que son irrévérence était compatible avec celle des marionnettes de Pupulus Mordicus. Résultat: Cabaret Gainsbourg.

Décidément, Serge Gainsbourg revient à l’avant-scène ces temps-ci, avec d’abord la sortie du film Gainsbourg (vie héroïque) et maintenant la création de Cabaret Gainsbourg. Cela dit, n’eût été des négociations pour les droits d’auteur, qui se sont étirées sur au-delà de deux ans, le spectacle aurait pris l’affiche plus tôt. En fait, l’idée remonte à 2004, alors qu’au hasard d’un coup de coeur musical, le metteur en scène Martin Genest découvre un Gainsbourg différent de celui, déglingué et plutôt antipathique, de ses souvenirs.

"C’était le dandy, le personnage plus frêle, timide, précise-t-il. Je me suis mis à lire sur lui et j’ai fait: "Wow, quelle vie trépidante!" Il a vécu la guerre, a été rejeté, n’a pas pu devenir peintre, a connu la popularité, la richesse, la décadence. Aussi, je ne pensais pas qu’il avait écrit toutes ses chansons et composé sa musique. Il est monté d’un échelon dans mon estime quand j’ai réalisé qu’il était un artiste, pas juste un personnage."

Car il faut dire qu’un personnage, il en était tout un… "J’ai été charmé de me rendre compte que ce n’était qu’une image et que je m’étais fait avoir, que j’avais tout à fait répondu à ce qu’il m’envoyait, c’est-à-dire: "Vous m’avez trouvé laid, eh bien! je vais me rendre loin là-dedans", observe-t-il. C’était un humain sensible, rempli de talent. J’espère que les gens vont voir ce que j’ai perçu de lui, ce côté touchant dans le spectacle."

À ce propos, il poursuit: "Le thème principal est l’opposition laideur/beauté. Pour moi, il s’agit de la cicatrice de Gainsbourg. Donc, j’ai beaucoup misé sur le contraste entre la beauté de la femme et ce qui peut être laid autour." Par ailleurs, Cabaret Gainsbourg n’a aucune prétention biographique. "C’est vraiment une fête, lance-t-il. Il n’y a pas de dramaturgie, en ce sens qu’il n’y a aucune histoire de racontée. Mais la ressource sensible est Gainsbourg, sa jeune période, ce qui fait qu’on va le sentir tout le long."

Cela, au gré de chansons connues, provenant presque toutes de la compilation Du jazz dans le ravin et pour lesquelles Genest a imaginé des tableaux très diversifiés quant aux accents musicaux (classique, jazz, Beast, Radiohead, etc.), aux formes d’art (danse, peinture, slam [Anne-Marie Olivier], musique, marionnette, masque, etc.), aux tons (sensualité, humour, sensibilité, poésie, performance, provocation, etc.), aux esthétiques (scripturale, de cinéma d’animation, etc.). Le tout, exécuté par une distribution extrêmement polyvalente, chacun portant plusieurs chapeaux.

Enfin, malgré de nombreux clins d’oeil susceptibles de plaire aux exégètes, l’objectif était surtout de créer une expérience sensorielle accessible à tous. "J’ai envie que les gens ne s’arrêtent pas à un texte, mais se laissent enivrer par des images et de la musique, explique-t-il. Il ne s’agit peut-être pas du bon mot, mais c’est comme 18 petits vidéoclips, où les spectateurs vont recevoir plein d’impressions."