Susanna Hood : Le grand frisson
Scène

Susanna Hood : Le grand frisson

La Torontoise Susanna Hood nous revient avec Shudder, un trio qui brosse un portrait cru des relations humaines.

L’une des principales caractéristiques de Susanna Hood est qu’elle travaille depuis 10 ans en étroite collaboration avec le concepteur sonore Nilan Perera. Si leur compagnie s’appelle Hum, c’est que le son y est toujours intimement lié au mouvement. Voix, échos des déplacements, sons préenregistrés, musique… Quelle qu’en soit l’origine, le son est toujours manipulé en temps réel. La nouveauté pour Shudder est l’utilisation d’un logiciel qui permet de complexifier la création sonore.

"Quelque chose de particulier se produit quand tu engages ta voix comme un mouvement corporel, assure la chorégraphe. Ça ouvre un autre monde de mouvements. Les interprètes pénètrent des couches plus profondes d’émotions, d’états d’être. Ils atteignent ce que j’appellerais un état primordial, précognitif, préanalytique, préverbal, et c’est ce que je pointe dans ma recherche dès le départ."

Au début de chaque création, Hood ouvre un champ d’exploration très large qui permet à chacun de plonger dans son intimité sans l’aborder de front. Pour She’s Gone Away, la dernière pièce présentée à Montréal, c’était l’état animal. Cette fois, c’est le peintre Francis Bacon qui a guidé la recherche, comme si les distorsions de ses portraits étaient une traduction picturale des effets du son sur les corps dansants. "L’idée pour moi est de prêter continuellement attention à ce qui émerge, de voir quelle »histoire » ça raconte et de suivre cela, commente la chorégraphe. Les choses qui surgissent prennent un sens particulier pour moi, mais je sens aussi qu’elles sont plus grandes que moi et c’est cela qui m’intéresse."

Sans être narratives, les oeuvres de la Torontoise parlent si viscéralement de l’humanité qu’on ne peut qu’en recevoir les messages. "Au fil des ans, je note que ce travail avec la voix part d’une abstraction pour évoluer vers quelque chose de narratif, poursuit-elle. C’est pour ça que je travaille avec une dramaturge: j’arrive dans des zones où j’ai besoin d’acquérir de nouvelles habiletés et de les consolider. Au cours de ce processus, on est arrivé à un point de jonction entre narrativité et abstraction où l’on s’est posé la question de la direction à prendre. Finalement, j’ai décidé de maintenir cette tension entre les deux." La thématique qui s’en dégage? Les côtés sombres et lumineux des relations familiales.