Gilles Poulin-Denis : Partir, revenir
Scène

Gilles Poulin-Denis : Partir, revenir

Rencontre avec Gilles Poulin-Denis, l’un des 20 auteurs de théâtre qui feront entendre un texte inédit lors de la 9e édition du Festival du Jamais Lu.

"L’ailleurs devient le lieu où camper les actions, les héros sont des immigrés en quête d’enracinement, des voyageurs bouleversés ou alors des protagonistes en mutation identitaire à l’intérieur de leur cellule sociale." C’est en ces termes que Marcelle Dubois parle des pièces de la 9e édition de l’événement qu’elle dirige, le Festival du Jamais Lu. Pour entrer dans le vif du sujet, nous avons rencontré Gilles Poulin-Denis, qui dévoilera lors de l’événement, dans une mise en lecture de Philippe Lambert, une première mouture de sa deuxième pièce, Dehors.

Formé à l’UQAM comme comédien, Poulin-Denis est originaire de Saskatoon, en Saskatchewan. Installé à Montréal depuis une dizaine d’années, il a signé quelques contes et courtes pièces, mais c’est avec Rearview, un solo présenté à Saskatoon, Québec, Ottawa et Winnipeg, qu’il a commencé à prendre l’écriture au sérieux. "J’ai eu beaucoup de très bons commentaires à propos de Rearview. Ça m’a donné le goût de continuer à écrire, de jouer avec les mots, de raconter des histoires… autrement dit, d’écrire tout court, pas juste dans le but de jouer. Je vais sûrement revenir au monologue, mais j’avais d’abord envie de casser ce que j’avais fait. Je voulais sortir du réalisme, du plausible, aller vers le poétique, le fantastique, mais aussi opter pour une structure chronologique, plus linéaire, qui m’oblige à être dans l’action plutôt que dans l’intellectualisation du propos."

Le jeune homme s’est donc lancé dans l’écriture d’une pièce ambitieuse intitulée Dehors, une partition qui entremêle les tons, les territoires et les registres linguistiques. On y trouve une critique sociale, mais aussi un drame personnel, et même des élans de fantastique. Le personnage principal, Arnaud, correspondant de guerre, est aux prises avec des troubles psychologiques, un choc engendré par ce qu’il a vu à l’étranger, mais aussi par son retour dans un pays dont la "paix" est indécente. Avec Luc Moquin et Emma Haché, Poulin-Denis est auteur associé au Théâtre français du CNA. Parce que son texte aborde la guerre – un thème que peu de jeunes auteurs, outre Philippe Ducros et Serge Mandeville, osent aborder -, il sait que plusieurs vont reconnaître dans son oeuvre l’influence de Wajdi Mouawad.

"J’en suis tout à fait conscient, dit-il, mais ce sont des choses qui me travaillaient bien avant le début de la résidence à Ottawa. Même si je ne l’ai pas connue, je voulais écrire sur la guerre. Mais sans faire la morale. C’est pour cette raison que j’ai choisi un personnage extérieur, qui est témoin de ça mais qui ne le vit pas personnellement." Si bien que c’est d’abord et avant tout le drame d’un homme nord-américain que l’on suit, sa descente aux enfers, son histoire familiale pleine de noeuds, la détresse qu’il ressent à vivre dans un pays terriblement en paix.

La pièce de Gilles Poulin-Denis sera lue le jeudi 6 mai à 20 h par Jean-Antoine Charest, Sébastien Dodge, Catherine Larochelle et Émile Proulx-Cloutier.

Festival du Jamais Lu
Du 30 avril au 8 mai
Au O Patro Vys, mais aussi au TNM et Aux Écuries
www.jamaislu.com

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Hockey, théâtre musical et dramaturgie chilienne

Cette année, le Festival du Jamais Lu offre une tribune à 20 jeunes dramaturges québécois, canadiens et chiliens. Avec Lequel est un Basquiat, Philippe Racine s’interroge sur ce que veut dire être Noir en Amérique en 2010. Dans La Nuit, la vigie, Véronique Pascal dépeint la vie de jeunes gens dans un bidonville. Emmanuelle Jimenez, avec Soleil Barclay, et Marcelle Dubois, avec Québec, je te mangerai un jour!, ont écrit d’après leurs rencontres avec des femmes immigrantes aux prises avec des difficultés d’intégration. Avec Yukonstyle, Sarah Berthiaume nous entraîne en région éloignée. Alors que Mathilde Dumont signe Le Manoir, une comédie musicale sur la mort, Érika Tremblay-Roy donne Petite Vérité inventée, un théâtre musical pour la jeunesse.
Les Lettres arabes d’Olivier Kemeid et Geoffrey Gaquère sont aussi celles de Momo et Rachid, deux Arabes de la banlieue parisienne perdus à Montréal. Avec Perdre ses eaux, Justin Laramée met en scène des personnages qui retrouvent leur liberté après la mort de leurs enfants. Dans L’Imposture du corps, Marie-Laurence Rancourt s’intéresse à l’insurrection des peuples en guerre. Notre passion pour le hockey est quant à elle disséquée dans L’Angoisse de l’arbitre…, de Martin Bellemare, et Nos bras meurtris, une oeuvre collective dirigée par David Laurin.

Ramón Griffero racontera le Chili qu’il a trouvé à son retour d’un exil forcé par le coup d’État de 1973, en plus de présenter, avec une équipe de comédiens québécois, des textes issus de la nouvelle dramaturgie chilienne. Les Confessions publiques, "plongeon dans les motivations intimes, sociales et artistiques des auteurs issus de deux générations", sont de retour cette année avec Suzanne Lebeau, Reynald Robinson, Lise Vaillancourt, Fanny Britt, Étienne Lepage et Emmanuel Schwartz. David Savard est à l’animation.