Festival Petits Bonheurs : Bébé à bord
Scène

Festival Petits Bonheurs : Bébé à bord

Dans le créneau du théâtre pour bébés, le Québec traîne la patte. Pas pour longtemps, grâce au festival Petits Bonheurs et à son directeur Pierre Larivière, qui ont fait des tout-petits leur public privilégié, d’Hochelaga-Maisonneuve jusqu’au grand Montréal et maintenant Laval et Sherbrooke.

Le théâtre jeune public est en excellente santé au Québec. Ses artistes les plus doués et les plus audacieux bénéficient d’une enviable reconnaissance internationale leur permettant de faire tourner leurs spectacles pendant des années ici comme ailleurs. De ces compagnies jeune public florissantes on verra plusieurs spectacles récents dans l’édition montréalaise du festival Petits Bonheurs. Joël da Silva revient avec Le Temps des Muffins, délirante pièce de théâtre d’objets, alors que la compagnie L’Arrière Scène présente La Robe de ma mère, succès notoire de la scène jeune public de la dernière décennie, comme Amour, délices et ogre, du Théâtre des Confettis, ou encore Le Cabaret dansé des vilains petits canards, spectacle de danse de la chorégraphe Hélène Blackburn. Tout ça, et plus encore…

Le plus étonnant, c’est qu’une telle effervescence n’ait pas encore fait des Québécois les meneurs du théâtre pour bébés. Dans ce créneau en pleine ébullition, les Européens tiennent le haut du pavé et ne viennent pas très souvent se promener de ce côté-ci de l’Atlantique. Pierre Larivière, fondateur et directeur de Petits Bonheurs, s’est donné la mission de renverser la tendance. "J’étais moi-même sceptique au début par rapport au théâtre pour poupons, j’imaginais qu’il ne s’agissait que de petites pièces sensorielles et très infantilisantes. Mais il faut venir en voir pour comprendre que c’est beaucoup plus large que ça et qu’on ne peut absolument pas enfermer ce théâtre dans des catégories trop figées. Ce qui me fascine davantage encore, c’est le formidable lien qui est créé avec l’enfant durant ces spectacles."

Le meilleur de la création européenne

En plus de favoriser les échanges sur le théâtre pour bébés entre des artistes québécois et européens, Larivière déniche chaque année le meilleur des spectacles pour poupons en Europe. Cette fois, ses trouvailles viennent d’Espagne, d’Italie et du Danemark. Dans Parapapel, de la compagnie Molecula, deux comédiens s’enroulent et s’emmêlent dans le papier, "dans une pièce d’une grande beauté plastique", comme le dit Larivière. "C’est très aérien, un peu sensoriel. Le théâtre pour poupons est rarement narratif, il est plutôt visuel, et ici on est à la fois dans le sensible et le plastique."

Le spectacle Ba Ba, du Piccolo Principi Teatro, est plutôt de l’ordre de la "promenade visuelle et sonore". "Je l’ai vu à la Montagne magique à Bruxelles. C’est mon coup de coeur, et ça a même été présenté pour les adultes dans les musées." Du Danemark, le Theater Madame Bach débarque avec Pluie, spectacle couronné de prix et qui devrait plaire à tout le monde, si l’on en croit le directeur de Petits Bonheurs. "À Méli’môme, festival jeune public à Reims, en Bretagne, ça a été un gros succès il y a deux ans." On ira voir.

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Pour le bonheur des petits Lavallois

Les Petits Bonheurs se répandent maintenant jusqu’à Laval où seront présentés quatre spectacles et une dizaine d’ateliers pour éveiller la créativité des bouts de chou.

Les 2 à 5 ans ont toujours été bien servis en matière d’art à Laval avec la Semaine de la petite enfance qui se tenait auparavant en février. L’association avec le festival Petits Bonheurs s’imposait malgré tout, pour donner raison à l’adage: L’union fait la force. Le programmateur François Hurtubise en est venu à cette conclusion lors de son dernier voyage à Reims au festival Méli’môme où il a côtoyé le créateur des Petits Bonheurs. "On avait les mêmes coups de coeur. C’est plus simple de faire venir des compagnies d’outremer au même moment. Et comme le nom Petits Bonheurs était beaucoup plus joli que le nôtre, nous avons changé d’identité." Les petits Lavallois auront ainsi le grand bonheur de découvrir la compagnie française La compagnie s’appelle reviens, gagnante du Molière pour la meilleure production théâtre jeunesse. Son spectacle intitulé 86 cm oppose le tout petit au très grand avec un comédien principal de petite taille. "L’acteur joue un enfant de 3 ans dans un carré de sable. Il faut d’ailleurs user d’imagination pour réaliser ce décor, comme la compagnie ne peut voyager tout son sable de la France." L’union avec Petits Bonheurs est aussi avantageuse pour les compagnies québécoises qui doublent ainsi les chances d’atteindre leur public cible. C’est le cas du théâtre Bouches décousues qui en profite pour présenter son nouveau spectacle Ginkgo et la Jardinière à Montréal et Laval. Décrite comme un univers très ludique, la pièce nous transporte dans le jardin où vivent le vieil arbre Ginkgo et son amie jardinière à travers les saisons.

Par ailleurs, pour la première fois, deux centres communautaires situés dans les quartiers plus défavorisés de Laval se transformeront en salles de spectacle pour accueillir les spectateurs en herbe. La tâche de porte-parole de l’événement a été confiée au psychoéducateur Germain Duclos. "C’est un intervenant précieux qui connaît bien le milieu communautaire. Il est en mesure de comprendre l’importance de l’art dans le développement d’un enfant." La programmation est complétée par une dizaine d’ateliers d’initiation aux arts comme la danse, la percussion et plusieurs autres disciplines. (Émilie Perreault)