Steve Gagnon : La montagne sacrée
Scène

Steve Gagnon : La montagne sacrée

Steve Gagnon, depuis sa sortie du Conservatoire en 2008, semble être partout: il joue, met en scène, écrit. Dans quelques jours sera créée, au Carrefour international de théâtre, sa pièce La Montagne rouge (SANG).

Texte primé au Carrefour en 2007 et salué du Prix première oeuvre de la Ville de Québec en 2008, La Montagne rouge (SANG) présente un duo où s’entremêlent présent et passé. Une jeune femme retourne sur la montagne où elle avait l’habitude d’aller avec son amoureux, un an après qu’il eut commis l’irréparable. "Elle a un besoin urgent de se libérer, explique Steve Gagnon. Elle demande à son amoureux de venir la rejoindre, elle lance un appel: "Peu importe comment, faut que j’aie un dialogue avec toi." À travers cette rencontre, elle a accès à lui, un an auparavant, et à des choses qu’il lui avait dites et qui là, sonnent autrement. Dans la vie, parfois, on envoie des signaux; mais au travers du quotidien, quand ça arrive à l’autre, c’est déjà teinté d’autre chose. Ils se retrouvent comme hors du temps: c’est dans cette pureté-là que les choses lui apparaissent." Ainsi se croisent conversations et souvenirs, extraits de journal intime, le tout fondu en une trame où, par choix, les démarcations sont effacées. "Tout passe par elle, de toute façon: il y a plein de choses qui la traversent. À partir de là, on peut se permettre une grande liberté."

"C’est pas une pièce sur le suicide, poursuit-il. Le suicide est un fil dramatique plus qu’un thème: c’est ce qui permettait la rencontre. Le thème féminin, c’est le besoin de la jeune femme de faire son deuil. Pour lui, c’est son intranquillité, cette espèce d’inconfort que je remarque autour de moi, chez des jeunes gars. Le fait de pas savoir quoi faire de ça; c’est comme une pulsion, une impulsion, une rage ou une insatisfaction, que j’ai amenée, dans ma pièce, beaucoup plus loin, jusqu’au suicide."

L’auteur, également interprète de la pièce avec Claudiane Ruelland, dans la mise en scène de Frédéric Dubois, connaît bien cette impression. "Cette intranquillité, je la vis, et j’ai un ami qui la vit aussi; on est capables de vivre avec ça, mais ça nous donne un tempérament très impulsif, agressif parfois. On ressent un inconfort, comme si on avait de la misère à accepter les choses sans se poser de questions."

Steve Gagnon touche plusieurs métiers du théâtre. Le plus lointain: l’écriture. "La première pièce que j’ai écrite, c’est en 5e année. Avec un ami, on avait fait la mise en scène et on jouait dedans; on la présentait dans les classes plus jeunes. C’est drôle: mon premier contact avec le théâtre a été intense, et je sais pas pourquoi, comment cette idée m’est venue. Après, j’ai toujours continué: tout était clair, et j’ai jamais arrêté d’écrire."

Cette année, Steve Gagnon a joué dans trois pièces, fait une mise en scène, et les projets se bousculent. Signe d’intranquillité?

"Oui, oui, c’est sûr! C’est comme une espèce de truc qui bouillonne. Mais je pense qu’à 24 ans, c’est notre job d’être impulsif, de manquer de nuances, d’être un peu brouillon et maladroit, alors je vais là-dedans et je me pose pas trop de questions; à 40 ans, je ferai autre chose. Mais là, j’y vais parce que c’est naturel, je retiens rien."