Michel Duchesne : Le réconfort et la différence
Michel Duchesne propose une nouvelle version de sa pièce Une petite laine, troisième volet de la trilogie Tricoté serré. De la colère à l’acceptation.
Lorsqu’il a écrit Tricoté serré, Michel Duchesne avait envie de parler de sa famille et à sa famille. La trilogie (complétée par Une maille à l’envers et Une petite laine) à paraître chez Dramaturge Éditeurs à la fin du mois est d’ailleurs dédiée à son père, qui n’était pas un amateur de théâtre. "Je voulais l’intéresser, l’émouvoir et rendre hommage à mes origines. Que mes oncles, mes tantes, mes cousins, mes cousines se reconnaissent", explique-t-il.
Même si l’histoire évolue d’une pièce à l’autre, il n’est pas nécessaire d’avoir vu les deux premières parties pour apprécier la troisième. Chacune raconte une journée charnière, "où les gens font le point et essayaient de dénouer des noeuds pour ne pas rester dans l’amertume, les regrets, précise-t-il. Chaque volet porte sur un enjeu différent. Dans Une petite laine, il s’agit de passer de la colère initiale face à un deuil à la réconciliation et à l’acceptation."
Un aspect sur lequel insiste encore davantage sa nouvelle version, avec ses quelque 30 à 40 % de matériel inédit. Les Gauthier s’y réunissent toujours dans leur maison de Charlevoix peu après le décès du père de Patrice (Lucien Ratio), le personnage principal. Mais le message d’espoir de sa mère (Denise Gagnon) et de ses tantes (Marie-France Desranleau et Ginette Guay), ses trois "fées marraines", semble encore plus efficace pour endiguer sa révolte.
Peut-être parce que l’auteur a lui-même eu besoin de ces paroles réconfortantes, tandis que, peu après la création de la pièce, son père apprenait qu’il avait le cancer et décédait quelques mois plus tard. "Entre 2007 et 2010, la réalité a rejoint la fiction, constate-t-il. Mon père avait beaucoup aimé rire dans Tricoté serré et Une maille à l’envers, mais Une petite laine avait une tonalité un peu plus grave, alors j’ai ramené de la joie."
Cette tendance lumineuse se reflète aussi dans la nouvelle mise en scène signée Richard Aubé et le jeu de la nouvelle distribution. "Tricoté serré avait été créée à Eastman, mais quand Richard l’avait montée à Québec l’année suivante, il l’avait magnifiée. Il y avait encore plus d’humanité, de tendresse, se souvient-il. Je trouve qu’il est très fort pour exprimer la vie entre les lignes, illustrer le non-dit."
Aussi, comme il s’agit d’un théâtre naturaliste où le spectateur doit avoir l’impression d’être voyeur, "ça demande une direction d’acteurs très fine et les six comédiens sont brillants. Cette navigation du rire aux larmes se fait sans heurt. Ce n’est pas appuyé, il n’y a rien de grossier. On est vraiment dans un théâtre touchant", observe-t-il.
Enfin, il conclut: "Je pense qu’Une petite laine peut aider les gens qui ont eu à vivre avec un proche atteint d’une maladie terminale ou à faire un deuil. Il y a une tristesse devant quelque chose qui s’éteint, mais surtout, une reconnaissance devant la chance qu’on a eue de connaître cette personne."