Francine Bernier : Une vraie pépinière
Scène

Francine Bernier : Une vraie pépinière

Institution majeure dans le paysage de la danse contemporaine québécoise, l’Agora de la danse fête son 20e anniversaire. Regard sur le chemin parcouru avec sa directrice générale et artistique Francine Bernier.

Quand la créatrice et enseignante Martine Époque a l’idée d’installer le département de danse de l’UQAM dans le bel édifice de la rue Cherrier et d’y créer des salles de spectacle, il n’existe encore aucun lieu dédié à la danse contemporaine à Montréal. Florence Junca-Adenot, alors vice-rectrice finances à l’Université, partage sa vision et fait du rêve une réalité en s’associant avec le Regroupement québécois de la danse et Tangente, qui met enfin un terme à 10 ans d’itinérance. Deux ans plus tard, Francine Bernier quitte le monde du théâtre pour prendre la barre de l’Agora.

"Avec un déficit de 85 000 $ et 45 000 $ de subventions, il y avait un problème, s’exclame-t-elle en riant. La salle était louée aux artistes, ils y entraient deux jours avant la première et, pour la plupart, ils avaient oublié d’envoyer des invitations et d’informer les médias qu’il y avait un spectacle! Très vite, nous avons décidé de codiffuser et de nous occuper de la mise en marché."

Très vite également, madame Adenot, présidente du conseil d’administration exceptionnellement dévouée et efficace (en poste depuis 20 ans), met en place un fonds de création qui va permettre à l’Agora de coproduire bon nombre de spectacles. Plaçant l’artiste au centre de ses préoccupations, Francine Bernier inaugure un programme de résidences de création et offre 10 jours de travail en salle avant la première.

"La recherche a besoin d’outils et l’Agora en est un, affirme-t-elle. Son rôle essentiel est d’accompagner des créateurs dans le développement de leur carrière. Et aujourd’hui, c’est avant tout 20 ans de création en danse qu’on célèbre. On a vu les langages se diversifier et le dialogue entre son, lumière et mouvement se raffiner. La qualité des productions a vraiment augmenté. Par exemple, pour ce qui est des créations lumière, ce qu’il y a de plus intéressant en ville, c’est en danse qu’on le voit."

Fortier, Navas, Desnoyers, Blackburn, Clareton, Léveillé, Lock, Gillis, Van Grimde… La liste est longue des créateurs qui sont passés par l’Agora et lui demeurent fidèles. Symbolique porte d’entrée au panthéon des chorégraphes consacrés, elle est aussi, avec ses 241 places, une salle plutôt intime où de multiples activités sont offertes à différents types de public pour se rapprocher de la danse et mieux la comprendre. Faisant la part belle aux Québécois, elle développe aussi des relations durables avec des créateurs du Canada anglais et de l’étranger, créant des ponts pour faciliter le rayonnement de notre culture chorégraphique à l’international. En 2001, Francine Bernier était ainsi nommée chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres par le gouvernement français pour sa contribution à la coopération franco-québécoise.

Fière d’avoir accompli sa vision et d’avoir perduré malgré les difficultés occasionnées par la prolifération de l’offre en danse, la directrice envisage un renouveau pour l’Agora sans trop savoir quelle forme il pourra prendre. Et si la désaffection progressive des médias pour la danse de création n’empêche pas son équipe d’atteindre ses objectifs, elle revendique pour les artistes en danse la place qui leur revient sur la place publique.