Guillaume Côté : Grand retour
Scène

Guillaume Côté : Grand retour

Après sept ans d’absence, le Ballet national du Canada réinvestit la scène montréalaise avec des oeuvres de Marie Chouinard et de Crystal Pite. Entrevue avec le Québécois Guillaume Côté, l’un des danseurs étoiles les plus cotés au monde.

Depuis sa fondation, en 1951, le Ballet national du Canada (BNC) s’est attaché à la reprise de grandes oeuvres classiques du 19e siècle. Fort des quelque 70 interprètes qui le composent, il est d’ailleurs la seule compagnie canadienne à pouvoir les monter. Au fil des ans, son répertoire s’est étendu aux créations de chorégraphes du 20e siècle tels que Balanchine, Ashton, Forsythe, Kylian ou encore Kudelka, qui a assuré la direction artistique de la compagnie pendant plus d’une décennie, assisté de l’ex-ballerine Karen Kain. En prenant la barre du BNC, cette dernière a introduit des écritures et des pratiques plus contemporaines, bouleversant les habitudes des danseurs autant que du public.

"Quand on a eu l’occasion de travailler avec Marie Chouinard, ça a été quelque chose de spécial pour tout le monde", raconte Guillaume Côté, enfant prodige qui a quitté son Lac-Saint-Jean natal à l’âge de 9 ans pour vivre sa passion et qui a fait ses classes au BNC où il est danseur étoile depuis 2004. "En classique, les gens viennent regarder la classe et font leur casting, mais avec Marie, ça a été deux semaines d’expérience en atelier, histoire de s’ouvrir un peu l’esprit. C’était quelque chose de totalement nouveau pour nous."

Exit, les personnages de princes à façonner et à camper. Au placard, les en dehors et les efforts constants pour se faire plus grands et plus beaux que nature. La danse contemporaine demande de dialoguer avec le sol, d’accuser le poids du corps, de se concentrer sur l’essence du mouvement au-delà de sa forme… D’être plutôt que de représenter. "J’ai appris d’autres façons de travailler et ça a changé mon regard sur les choses, commente Côté, qui s’essaye à ses heures à la chorégraphie en plus d’être compositeur-interprète. J’ai découvert, entre autres, qu’une pièce pouvait être simple et très puissante à la fois et que le génie d’un danseur était aussi d’être à l’aise là-dedans. Au fond, ce qui importe n’est pas combien tu fais, mais comment tu le fais."

Les 17 interprètes de 24 Preludes by Chopin ont eu un peu plus de deux mois pour intégrer cette oeuvre créée à l’origine pour neufs danseurs. Ils se sont basés sur des vidéos très précises concoctées par les Montréalais qui ont créé les rôles et ont travaillé en direct avec certains danseurs de Chouinard. Quant aux 38 interprètes engagés dans Emergence, de Crystal Pite, ils ont dû se familiariser avec le principe d’isolation caractéristique de la gestuelle de la Vancouvéroise et ont suivi un tout autre processus de création.

"Crystal était très préparée, car elle n’avait que deux semaines pour créer un ballet de 23 minutes, poursuit Côté. Elle nous a demandé de travailler en groupe pour chorégraphier les liens entre des séquences très calculées et très écrites. Moi qui répète généralement seul en studio avec ma partenaire, j’ai aimé ce travail de groupe et le fait que tout le monde soit au même niveau. Ça a resserré les liens dans la compagnie." Dansée sur pointes, l’oeuvre actualise le rôle du corps de ballet et fait grouiller un univers d’insectes pour traiter de la vie en société.

Une soirée qui s’annonce des plus riches et s’affiche résolument comme un must dans la saison d’automne.