Dominique Leduc / Piaf : Vie multiple
La comédienne Dominique Leduc succède à Sylvie Drapeau dans le rôle de Piaf, dans la pièce du même nom.
Il y a une quinzaine de jours, on apprenait que Sylvie Drapeau, pour des raisons de santé, se retirait de Piaf, la plus récente pièce des Productions Jean-Bernard Hébert. Plutôt que d’annuler la tournée québécoise, celles-ci ont vite jeté leur dévolu sur Dominique Leduc comme interprète de la chanteuse iconoclaste.
"Jean-Bernard m’a proposé de remplacer Sylvie parce que j’ai joué Momone, la grande amie de Piaf, tout l’été dans la production. Donc je connaissais déjà la mise en scène, le décor et j’étais disponible étant donné que je jouais déjà dans le show [rires]. Bien sûr, c’était un gros travail puisqu’il fallait apprendre le texte, les chansons et endosser ce personnage-là, ce corps-là, ce tempérament-là. Et c’est quelque chose: c’est un monstre, Piaf! C’était une grande chanteuse, une femme qui avait énormément de génie et de talent, mais qui était aussi destructrice et enragée. Donc, c’est toute une énergie à porter, mais disons que le passage s’est fait de façon assez naturelle", souligne de sa voix douce celle que l’on peut voir à Télé-Québec, dans la série jeunesse Kaboum.
Piaf, femme d’extrêmes, se distinguait en effet par son intensité. Pour cette raison, l’incarner se révèle-t-il exigeant? "Oui, répond Leduc. Parce qu’elle a vécu de grandes douleurs dans sa vie. Elle a été abandonnée par sa mère. Et toute sa vie, elle a beaucoup souffert de ça. Elle avait un trou à l’intérieur d’elle qui était insondable, pas "colmatable". C’est une femme qui a cherché l’amour absolu toute sa vie. Elle a souffert physiquement aussi: en plus de son arthrite rhumatoïde, elle a eu trois graves accidents de voiture. Elle a perdu des côtes, a eu la mâchoire écrabouillée. D’où l’alcool, la drogue et les épisodes extrêmement sombres de sa vie."
Un parcours sinueux
Écrite par la Britannique Pamela Gems et mise en scène par Jacques Rossi, Piaf explore quelque 30 ans de la vie de la Môme, de son premier contrat comme chanteuse, alors qu’elle vivait dans la rue, aux heures précédant son repos éternel. Une oeuvre qui, bien que ponctuée de plusieurs grands succès de l’interprète, n’a cependant rien d’une comédie musicale. "C’est tout ce parcours-là qui est raconté et les chansons sont des intermèdes. Il y a une pièce quand on passe d’une époque à une autre, d’une scène à une autre, d’un lieu à un autre… Piaf participait à l’écriture de ses chansons et racontait des moments de sa vie à travers elles. Donc on s’en sert pour pouvoir exprimer certaines choses sur des moments de sa vie."
Parlant de vie, que retient la comédienne de ce pilier de la chanson française? "Une force de vie inouïe. C’était une femme qui était autant entraînée vers des zones très destructrices – elle était capable de sombrer dans des écueils et d’aller très, très bas -, mais qui avait un sens du rebond, un désir de vivre qui est difficilement explicable. Avec ce qu’elle a vécu, on peut durement croire qu’elle s’en soit sortie vivante aussi longtemps. Elle est morte très jeune, à 46 ans. Et à 46 ans, elle en avait l’air de 80. C’est comme si elle avait vécu trois vies en une!"