La Robe de Gulnara / Isabelle Hubert : Noces rebelles
Scène

La Robe de Gulnara / Isabelle Hubert : Noces rebelles

Pièce d’abord publiée en France, La Robe de Gulnara, de Ia Gaspésienne d’origine Isabelle Hubert, transporte le public en Azerbaïdjan. Bienvenue dans un théâtre sans frontières.

Sur Google Earth, on peut très bien voir la gare de Saatli, dans le sud de l’Azerbaïdjan, où des familles chassées d’Arménie vivent dans des wagons désaffectés. Dans l’histoire imaginée par Isabelle Hubert, cette communauté s’apprête à marier deux des siens, un interlude de bonheur dans un quotidien si tragique. Mais la pause sera courte: un bête accident compromet la cérémonie…

L’union d’Isabelle Hubert et Jean-Sébastien Ouellette, couple à la ville comme au théâtre, semble, pour sa part, bien établie. "Par pudeur, pendant plusieurs années, on travaillait chacun de notre côté. Puis un jour, je l’ai vu en interaction avec des comédiens et j’ai eu une révélation. Je me suis dit: "Wow, quel directeur d’acteur!" Il était déjà mon conseiller dramaturgique personnel, mais on a maintenant décidé qu’il monterait tous mes textes. Et c’est là que j’ai conclu qu’il fallait coucher avec son metteur en scène!" s’esclaffe l’auteure.

Jean-Sébastien Ouellette qualifie sa nouvelle mise en scène de "cinématographique, avec des focus et des effets de gros plan", mais précise que La Compagnie dramatique du Québec, menée par le couple, ne donne pas dans la révolution de l’objet théâtral: "On n’a pas tellement envie de repousser les limites formelles du théâtre, c’est pas vraiment notre tasse de thé. Nous, on a envie d’émouvoir, d’utiliser les mécanismes qui fonctionnent depuis 5000 ans!" clame-t-il.

Leur première production conjointe, À tu et à toi, laissait déjà entrevoir un intérêt pour le mélange de drame et d’humour, sur fond d’histoire d’amour et de guerre. Pour Jean-Sébastien Ouellette, "La Robe de Gulnara, ce n’est ni une comédie ni une tragédie, mais une "humanie". On a voulu montrer à quel point ils manquent de tout. Par exemple, sur la scène, on a installé une sorte de tuyau. Quand l’eau finit par en sortir, c’est la fête, tout le monde vient remplir son seau et, en même temps, c’est le combat, ils se lancent dessus comme des rapaces sur une proie." Les réactions devant la misère sont complexes et diverses sous la plume d’Isabelle Hubert.

Planter une histoire dans un décor aussi précis commande un travail de recherche étayé. "YouTube, c’est merveilleux!" s’exclame Jean-Sébastien Ouellette. Pour créer la scène du mariage, un moment charnière du spectacle, ils ont longuement sillonné les moteurs de recherche: "On tapait mariage et Azerbaïdjan et on ne trouvait rien. Mais on a un ami d’origine turque qui l’a écrit dans la langue et là, on a pu visionner 45 petites vidéos amateurs de mariages!"

Internet a aussi ouvert la porte des folklores musicaux azerbaïdjanais aux deux compositeurs de la bande-son du spectacle, Andrée Bilodeau (Les Batinses) et le comédien-musicien Patrick Ouellet. Une trame musicale qui semble avoir stupéfait les huit comédiens: "C’est tellement réaliste, affirme Isabelle Hubert, qu’au début, personne ne croyait que c’était Patrick et Andrée qui avaient composé ça et qui chantent les chansons!"