Jean-Thomas Jobin : Trop fort pour la ligue
Scène

Jean-Thomas Jobin : Trop fort pour la ligue

Dans Soulever des Corneliu, Jean-Thomas Jobin part en mission, toujours à la recherche de l’absurdité suprême.

Jean-Thomas Jobin, l’homme fort de l’absurde québécois, s’est retroussé les manches afin d’affronter l’étape du deuxième spectacle. On le sait apte à vulgariser les choses simples, mais lorsqu’il est question de son art, l’humoriste est porté à l’intellectualiser avec un trop-plein de questionnements. Humour complexe? "C’est un humour cérébral. Il faut être concentré", précise-t-il.

Reste que les labyrinthiques réflexions de Jobin semblent avoir mené sa barque jusqu’à bon port. "L’important en humour, c’est de surprendre. En absurde, je dirais que c’est encore plus flagrant. J’avais donc le souci de me renouveler, mais sans me dénaturer. Un deuxième show, c’est fastidieux." Sa stratégie fut d’éviter sa zone de confort. "J’ai voulu prendre des risques. À ce jour, c’est ce qui m’a le mieux servi dans ma carrière. Quand je n’en prends pas, je deviens inquiet."

Son premier "beau risque": le titre du spectacle, Soulever des Corneliu, et l’affiche qui en découle. "Souvent, les titres de shows d’humour sont neutres ou éponymes; ça ne dit pas grand-chose. J’ai pris ça comme prétexte pour faire un gag. Je voulais une affiche déstabilisante. J’avais aussi le souci qu’elle situe mon style d’humour. Ceux qui connaissent mon genre comprennent le gag." Et d’où lui vient cette affection virile pour l’ex-académicien? "Corneliu a un nom très gagnant. Il y a de belles syllabes qui s’agencent bien. Sinon, Soulever des Nanette aurait pu être bien."

Le maître des clés

Dans Soulever des Corneliu, une mise en scène de Christian Bégin, Jean-Thomas Jobin nous revient avec son personnage de Jean-Thomas Jobin (!?), né d’un dérivé du vulgarisateur. Alors que le premier spectacle imposait une certaine distance entre les deux entités, l’humoriste se permet certains rapprochements. "Je m’amuse un peu plus à l’humaniser. Je laisse tomber quelques barrières pour laisser entrevoir la personne. Ça se traduit par le côté auteur de Jean-Thomas Jobin qui commente pourquoi il a écrit ce show-là, pourquoi ça le fait rire… C’est un peu pour donner des clés au monde, pour quand ça devient trop bizarre." Peut-on alors dire que ce second one man show est plus accessible? "Mon entourage pense que oui. Moi, je ne suis pas encore prêt à dire ça. Je dirais quand même que c’est moins hermétique. Le côté pince-sans-rire est un peu atténué."

Voulant bonifier son humour de dialogues, Jobin se devait d’introduire un second personnage dans le spectacle. Toutefois, ce n’est pas un comédien qui lui offre la réplique, mais une marionnette; un bel et tardif hommage au téléroman À plein temps… "Ça part du personnage de scène qui parle de son rêve d’être un héros de série policière. Il joue un jeu avec le public pour réaliser son rêve de participer à une mission. La marionnette – qui est manipulée par quelqu’un – l’aide. C’est comme son associé. C’est en toile de fond dans mon show, mais la ligne directrice demeure mon humour absurde et ironique."

Le roi du stunt

Jean-Thomas Jobin voue un grand respect à feu Andy Kaufman. Avancer que cet humoriste américain constitue une influence majeure du Québécois n’est aucunement périlleux. "Kaufman, c’était le roi du stunt. Moins le monde comprenait, plus il aimait ça. Son culot avait un tel niveau qu’il niaisait le monde one-on-one. Ce qui est magique, c’est que tu ne sais pas si c’était un fou ou s’il niaisait tout le temps", explique Jobin. Et qu’a-t-il pensé de la "blague" de l’acteur Joaquin Phoenix (à visionner sur YouTube si ce n’est pas déjà fait), qui a récemment fait l’objet d’un documentaire? "Je trouve le stunt vraiment drôle. C’est une très bonne idée. J’avais vu son truc à Letterman. Ce fut un gros gag bien monté."

Toutefois, quoiqu’inspirante, cette performance n’incitera pas Jobin à sortir de ses gonds lors d’un prochain passage à Bons Baisers de France. "Tenir un canular comme ça, je ne serais pas capable. J’aime déstabiliser, mais je ne suis pas sûr que j’aime tant le malaise."

Le 18 novembre
À la salle François-Brassard
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À voir si vous aimez /
André Sauvé, Bruno Blanchet, Andy Kaufman