Marie Chouinard : Entrer dans l'histoire
Scène

Marie Chouinard : Entrer dans l’histoire

Un livre d’art, deux entrées au dictionnaire, deux prix, sept reprises, une création et plusieurs projets sur la table: jusqu’en novembre 2011, Marie Chouinard célèbre les 20 ans de sa compagnie avec un chapelet d’évènements.

"Je vois toujours plein de bouquins sur la danse dans les librairies en Europe et nous, on n’a rien, lance la chorégraphe Marie Chouinard. Il est temps qu’on laisse une trace dans les livres." Intitulé cOMPAGNIE_mARIE_cHOUINARD_cOMPANY, le bel ouvrage bilingue publié par les éditions du passage retrace, en 176 pages, 20 ans de créations ayant marqué la scène contemporaine internationale. De nombreuses photos offrent un large panorama sur l’univers singulier de cette créatrice hors du commun, des annotations y précisent sa vision personnelle et des textes plus analytiques élargissent les perspectives sur son oeuvre. Ils sont signés par divers intellectuels canadiens et étrangers.

"Je ne me reconnais pas nécessairement dans leurs textes, avoue Chouinard. Presque tout le monde parle des animaux dans mon travail. Je ne suis pas d’accord avec ça, mais il faut bien que je me rende à l’évidence que les gens voient ça. Et puis, ça prend aussi la vision des autres pour faire un livre." À ce titre, les témoignages de plusieurs interprètes révèlent certains secrets de fabrication fascinants, ouvrant une fenêtre sur l’intimité de cette compagnie où l’on en bave mais où l’on exulte aussi, où l’on passe de dépassement en transcendance. Le livre est agrémenté de notes de parcours et de courtes biographies des principaux collaborateurs artistiques.

Remontons à 1990. Quand Chouinard fonde sa compagnie après 12 ans d’une brillante carrière solo, c’est tout un univers qui s’ouvre à elle. "La première année, j’ai essayé de donner aux danseurs tout ce que je savais sur la respiration, la tête, l’ancrage des pieds dans le sol, la connexion des bras au coeur, en leur donnant toutes sortes d’exercices pour la compréhension du corps et de la présence dans l’espace comme je les comprends, se souvient-elle. Je repérais les résonances entre certains mouvements que je donnais à faire et certains danseurs et j’allais plus loin. La pièce Les Trous du ciel [que Danse Danse présente en avril] s’est construite comme ça, et mon processus de création est un peu resté le même: communiquer quelque chose que je cherche, que je trouve, voir comment le corps des danseurs l’absorbe et ensuite, comment je peux transformer leur propre absorption."

Ce n’est qu’en 2009 que la chorégraphe se glisse à nouveau dans la peau de la danseuse avec le solo Gloires du matin qu’elle livre alors dans l’intimité de ses studios dans le cadre d’une campagne de collecte de fonds. Après l’avoir dansé à Venise, elle le reprend dans le même contexte les 25 et 26 novembre.

Alors qu’elle vient tout juste de voir sa carrière récompensée par un Prix du Québec (le prix Denise-Pelletier), qu’elle avait un peu plus tôt reçu le Prix du mérite artistique de la Fondation Imperial Tobacco et qu’elle a vu son nom entrer dans le Petit Larousse illustré 2010 et le Dixel 2011, Marie Chouinard mesure encore sa chance d’occuper les magnifiques locaux avenue de l’Esplanade et se lance dans plusieurs projets de films et d’installations. En attendant, pour 2011, Danse Danse nous réserve trois soirs de rétrospective en avril et, en novembre, Le Nombre d’or (live), créée aux Olympiques de Vancouver, tandis que La Chapelle nous offre en mai une recréation d’un solo datant de 1999, Des feux dans la nuit.

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Collectif
Éd. du passage, 2010, 176 p.