La Nuit juste avant les forêts : Brève scène 2010-11-25
En 1998, Brigitte Haentjens avait la bonne idée de guider James Hyndman dans La Nuit juste avant les forêts. Plus de 80 fois, le comédien a pris le monologue à bras-le-corps, avec une conviction qui a marqué l’imaginaire de toute une génération de spectateurs. Une décennie plus tard, la directrice de la compagnie Sibyllines a ressenti le besoin d’y revenir, de se replonger dans l’incomparable partition de Bernard-Marie Koltès, un texte vertigineux, doté de résonances intimes et collectives, qui plus de 30 ans après sa création n’a rien perdu de sa pertinence, sur le fond comme sur la forme. Cette fois, c’est à Sébastien Ricard que la metteure en scène a fait appel. Un choix fort judicieux. Au pied du mur, au coeur d’un hangar du quartier Saint-Henri, dans la peau d’un exclu, un laissé-pour-compte, un apatride, un bouc émissaire, un étranger qui dit sa rage de vivre et de mourir à petit feu, un animal aussi blessé que combatif, ni plus ni moins qu’une bombe à retardement, le comédien est d’une rigueur absolue. La représentation captive, dans tous les sens du terme. Il est impossible de se soustraire à la prise de parole, effrénée, d’une densité affolante, tragique sans être dénuée d’humour et d’esprit. Impossible de se soustraire au magnétisme de Ricard, à son engagement physique exceptionnel. Impossible de se soustraire au flux des images et des idées, galvanisant. Entre le cri et le chuchotement, la folie et la lucidité, la révolution et la romance, il y a une multitude de nuances que le comédien se fait un devoir d’emprunter, des rythmes et des modulations qui permettent au monologue de résonner, de se faire brillamment entendre et comprendre. Une parole tendue… comme on tend la main. Jusqu’au 11 décembre, au 661, rue Rose-de-Lima. Billetterie: 514 845-7277.