Amuleto : Chants de bravoure
Scène

Amuleto : Chants de bravoure

Avec Amuleto, Catherine Vidal livre un hymne imparfait mais néanmoins senti au Mexique, à sa poésie et à sa soif de justice sociale.

Une fois de plus Catherine Vidal se lance dans la délicate transposition d’un matériau littéraire au théâtre. Rappelons qu’avant d’adapter Amuleto, le livre de Roberto Bolaño, écrivain chilien mort en 2003, la jeune metteure en scène avait procédé à une opération semblable sur Le Grand Cahier de la Hongroise Agota Kristof. Le spectacle pour deux comédiens qui en a résulté a ravi tant de gens, notamment entre les murs du Quat’Sous, qu’on risque fort de le voir réapparaître quelque part la saison prochaine. Malheureusement, la nouvelle réalisation de Vidal n’est pas aussi maîtrisée.

Largement autobiographique, le roman de Bolaño est un hymne à la poésie et à la révolution, un chant de guerre et de désir. L’action se déroule au Mexique, essentiellement en 1968, alors que le pays se prépare à recevoir les Jeux olympiques d’été. Là-bas, comme un peu partout dans le monde à cette époque, des jeunes, des artistes et des intellectuels contestent, récusent, réinventent.

Pour camper cet univers, cette faune et cette époque, Vidal mise sur l’utilisation de l’espace et la force d’évocation de quelques objets et petits meubles. Elle le fait cependant, il faut le dire, avec moins de bonheur que dans Le Grand Cahier. Le spectacle conserve ainsi un caractère littéraire, narratif, verbeux et souffre même par moments de statisme. Renaud Lacelle-Bourdon, Olivier Morin et Victor Andres Trelles Turgeon sont lestes et justes, mais on ne s’attache guère à la galerie de jeunes hommes dessinés à grands traits, plus ou moins interchangeables, qu’ils incarnent.

Heureusement, au coeur de la représentation, il y a Auxilio Lacouture, une femme bienveillante, visionnaire, de toutes les avant-gardes et qu’on appelle avec beaucoup de reconnaissance (mais aussi une certaine moquerie) la mère de la jeune poésie mexicaine. Le personnage, plus grand que nature, fort attachant, colle à la peau de Dominique Quesnel. La comédienne arrive à un troublant mélange de détermination et de vulnérabilité, de naïveté et de sagesse. Ce sera sans nul doute l’un de ses plus beaux rôles en carrière.