Emmanuel Jouthe : Densité des corps
Emmanuel Jouthe multiplie les rencontres et les défis dans Cinq humeurs, une variation pour 12 danseurs sur le thème des Quatre saisons de Vivaldi.
Multiplier les échanges artistiques et se risquer dans de nouveaux territoires de création font partie des préoccupations qui marquent la démarche d’Emmanuel Jouthe. Avec Cinq humeurs, il a voulu mettre la danse au service d’une musique et créer avec des danseurs d’ailleurs. Ainsi, de nouveaux interprètes rejoignent les Montréalaises Ève Lalonde et Marilyne St-Sauveur dans la distribution et, dans chaque ville où s’arrête la pièce, une section créée avec des finissants en danse s’ajoute au spectacle structuré en quatre tableaux de trois mouvements, à l’image de l’oeuvre de Vivaldi.
"Ce travail élargit mon regard sur ma propre danse parce que je dois la rechercher à travers de nouveaux corps et des personnes qui ont une connaissance et un goût de la danse autres que les miens, commente le chorégraphe. Je dois d’abord sentir et apprivoiser l’interprète pour lui proposer un chemin vers ma danse. C’est un beau défi."
Pour la version montréalaise, Jouthe s’est imposé la nouvelle contrainte d’intégrer les six élèves de LADMMI à la chorégraphie dansée par les professionnels, plutôt que de leur créer une section. Ce sont donc 12 danseurs plutôt que six qui occuperont simultanément la scène de l’Agora.
En choisissant Les quatre saisons, le chorégraphe a misé sur la popularité de l’oeuvre pour créer instantanément un point de rencontre avec les artistes et avec le public. Transformée et augmentée par le compositeur Laurent Maslé, la musique prend littéralement corps à travers une scénographie faite d’enceintes, casques d’écoute, pieds de micro, etc.
"Vivaldi est exubérant, volubile, sensuel, émotif et il complète un mouvement naturel en moi, indique Jouthe. Ma danse pouvant être très bavarde, ça saturait très vite. Alors j’ai choisi de mettre l’accent sur la retenue et d’aller dans des climats opposés pour répondre à la musique et lui laisser plus de place. Je voulais vraiment que la chorégraphie soit interprète d’un corps musical."
Pour évoquer des humeurs saisonnières sans être littéral et contracter le temps d’une année en quelque 60 minutes, Jouthe a placé ses danseurs dans des situations d’inconfort où le mouvement se condense dans la contrainte et implose en écho à la vitalité vivaldienne. Un processus qui pourrait révéler une nouvelle facette du directeur de Danse Carpe Diem.