Médée : L’ancien et le moderne
Décevante Médée que celle mise en scène par Caroline Binet au Théâtre Denise-Pelletier.
Médée. Le nom à la fois fascine et fait horreur tant la violence qui lui est associée est hors du commun. Injustement répudiée par son époux, cette femme est animée d’une telle fureur qu’elle en vient à commettre le plus abominable des crimes: tuer ses propres enfants, non dans un accès de folie, mais avec la froide détermination d’une femme bafouée et vengeresse, pleinement consciente de la portée de ses actes.
Réalisée en 2009 pour un metteur en scène français, la traduction de Florence Dupont utilise une langue oralisée, actuelle et directe, qui met en évidence le discours féministe d’Euripide (en 431 av. J.-C.!) par la voix de Médée et le choeur des Corinthiennes. La metteure en scène Caroline Binet, qui se dit fascinée par les choeurs, a réalisé un travail rythmique intéressant, morcelant les phrases et donnant au choeur un caractère polyphonique (un peu de rodage demeure toutefois nécessaire).
Le reste du spectacle s’avère extrêmement décevant, grandiloquent à tendance kitsch (notamment dans les costumes), contrastant avec la modernité de la traduction. Fort mal dirigés, les comédiens adoptent des gestes maniérés et maladroits, prennent des poses, déclament, voire vocifèrent. Violette Chauveau, quittant rarement le registre criard, compose une Médée plus vulgaire qu’imposante, plus hystérique qu’indomptable.
En conséquence, l’émotion est absente, la violence de Médée irrite au lieu de terrifier, et ses crimes affreux laissent indifférent. Plusieurs scènes sont même franchement risibles, notamment le grand monologue où Médée pèse le pour et le contre de sa décision, ainsi que son départ de Corinthe, dans une robe dorée, auréolée de lumière orange et de fumée. Un ratage capable de convaincre un public d’adolescents que le théâtre, "c’est donc plate".