Leslie Baker : Femmes indisciplinées
Plus que jamais, l’indisciplinarité dont se réclame le Studio 303 est à l’honneur de la 18e édition du Festival Edgy Women. Leslie Baker y est programmée avec Fuck you, You fucking Perv!.
Fabienne Cabado
Photo : Bettina Hoffman
"Mon travail n’étant ni de la danse ni du théâtre traditionnel, j’ai toujours eu du mal à trouver ma maison et c’est bon d’être dans un événement où ce que je fais est ce qui est supposé être là", lance Leslie Baker, dont on a déjà pu voir les oeuvres à Tangente ou au Studio 303. Se situant dans les mouvances du théâtre postdramatique et des arts performatifs, sa démarche est caractérisée par un travail du corps mis en résonance avec du son, du texte et de l’image.
"J’ai déjà beaucoup utilisé la vidéo, mais cette fois, l’aspect visuel est composé d’objets et de mon propre corps, dont j’essaie de faire un accessoire, commente la créatrice. Mais je ne vais pas jusqu’à me blesser, comme certains artistes visuels et performeurs le font." Habituellement, Baker part aussi d’une image pour créer. C’est pourtant une improvisation réalisée l’an dernier dans le cadre du Edgy Challenge qui a nourri la création de Fuck you, You fucking Perv!.
"J’avais dû improviser autour du thème du prédateur avec un vautour, un son et une citation; et ce qui est venu, c’est l’idée de prédation sexuelle et du traumatisme qui en découle, explique-t-elle. L’inspiration était si forte que j’ai eu envie d’en faire une création." Pour ce faire, elle s’est attachée à la personnalité limite (dite aussi borderline), recensée parmi les désordres psychologiques pouvant résulter de la violence sexuelle dans l’enfance. Elle a inspiré à la fois le fond et la forme de la pièce.
On y assiste à des changements d’humeur brusques et radicaux. Le mouvement y est tantôt réaliste, très théâtral, tantôt plus fragmenté, plus poétique. Baker y fait même des claquettes pour parler du cycle infernal qui peut faire de l’agressé un agresseur à son tour. "Cette pièce parle d’une situation où la femme est la victime et l’homme, le prédateur, mais je conçois totalement que ça puisse être l’inverse, précise-t-elle. Et d’une certaine façon, j’essaie de dire que cette femme est aussi une prédatrice. Parce qu’au fond, une personnalité limite violente des gens autour d’elle."
Deux autres oeuvres viennent compléter la performance de Baker. Dans Role Model for a Store Clerk, les Japonaises d’anti-cool critiquent avec humour certains codes de conduite nippons, tandis que la New-Yorkaise Narcissister use du striptease à des fins subversives.