Mélissa Von Vépy : Mises en abyme aériennes
Avec Miroir miroir, la trapéziste Mélissa Von Vépy et le pianiste Stéphan Oliva livrent un duo poignant et inédit qui dépasse clairement les frontières du cirque.
Suissesse basée dans le sud de la France et circassienne de formation, Mélissa Von Vépy a baptisé sa compagnie Happés Théâtre vertical. Au-delà de la performance technique, c’est le travail sur les états de corps et sur le sens qui l’intéresse. "Le propos de départ doit pouvoir parler à tout le monde, traiter de préoccupations quotidiennes autres que celles du cirque, déclare-t-elle. Et, bien sûr, ça bascule et on se retrouve dans des situations atypiques par le travail de l’aérien."
Dans Miroir miroir, c’est d’apparence, de finitude et d’identité qu’elle traite en jouant avec un immense miroir accroché à son trapèze fixe. "J’ai été inspirée par une scène de Cris et chuchotements, de Bergman, où un homme place sa femme devant un miroir et décrit son caractère en décortiquant chacune de ses rides. Ça parle du temps qui passe, de finitude, mais surtout, de ce qu’on peut connaître de l’intériorité d’un être à partir de son apparence. C’est un des questionnements de la pièce avec, évidemment, ce qui se trouve de l’autre côté du miroir: existe-t-il un ailleurs meilleur, un autre possible?"
Si le principe d’agrès-décor est récurrent dans l’oeuvre de cette trentenaire déjà auteure de sept créations, la collaboration avec un musicien live est une première pour elle. Pour ce duo de 35 minutes, elle s’est jumelée à Stephan Oliva, compositeur éclectique et pianiste sensible qui offre un accès à l’intimité psychique de son personnage par une musique semi-improvisée.
"Stephan fait régulièrement des ciné-concerts et compose beaucoup à partir de souvenirs de films, commente la trapéziste. Sa musique a donc déjà quelque chose de très visuel et de très évocateur. Le plus complexe a été de trouver comment laisser de la place à l’autre. Ça a pris du temps avant que j’aie l’écoute pour vraiment fonctionner avec lui comme une autre musicienne, mais du coup, à chaque représentation, il m’emmène ailleurs, dans des endroits assez subtils d’interprétation; la chorégraphie ne change pas du tout au tout mais dans des petits rythmes. Il y a finalement beaucoup de place dans cette trame grâce à lui et à ces moments improvisés."
Une commande du Festival d’Avignon que la critique a encensée, soulignant l’inventivité théâtrale, la grâce, la poésie et son caractère bouleversant.