Simon Renaud : Équations elliptiques
Couleurs, mobilité et imprévus fascinent et inspirent le danseur et interprète gatinois Simon Renaud.
"J’ai des choses à prouver. J’en suis bien conscient", affirme le danseur gatinois Simon Renaud. C’est que, dans la Série Danse 10_Programme #5, présentée par l’Ottawa Dance Directive, le jeune diplômé de l’Ottawa School of Dance partagera la même scène qu’Yvon Soglo et Noam Gagnon, deux danseurs dont la réputation n’est plus à faire au pays.
Après l’obtention de son diplôme à l’été 2010, Renaud déménage pour Toronto afin de prendre part à une formation de tout près d’un an au Toronto Dance Theatre. Son exil ne s’est pas fait sans heurts. "Pendant mes deux premières semaines là-bas, j’étais déprimé. Je vivais dans un sous-sol. Je me couchais dans le noir et je me réveillais dans le noir."
Un jour de ténébreuse déprime, le chorégraphe Tedd Robinson, l’un de ses mentors, lui suggère de créer. Simplement, pour le bien que ça peut faire. "Il m’a dit de prendre trois jours, de filmer ça sur mon iPhone", se remémore le danseur à la verve passionnée. "J’ai passé du temps dans une serre. Je mangeais une pêche. J’étais heureux. Les couleurs me fascinent, et ce jour-là, elles étaient vraiment belles."
À mi-chemin entre la théâtralité et l’abstrait, "en slow motion" sculptural non loin du performing art, Simon Renaud soutient que son oeuvre s’avère "une pièce artistique en mouvement". Une vingtaine de minutes d’images dont les lumières sont filtrées à travers des plastiques mi-opaques, avec des tons d’orangés et de peau. Des images qui ne s’adressent pas à tous, le danseur en convient. "J’utilise le nu, pas pour choquer, mais parce que je trouve intéressante l’image du corps sans vêtements."
"J’ai voulu explorer ces équations de la vie qui font en sorte que chaque événement sera différent, peu importe la situation et la façon dont il est vécu par la personne. La pêche, le fruit, représente cet élément intrus dans la vie. Et mon solo s’attarde aux différentes réactions que l’on pourrait avoir quand un événement clashe dans notre vie."
Avec sa gueule de jeune premier, il serait naturel de suggérer à Simon Renaud de prendre part aux auditions de ces téléréalités qui s’intéressent à la danse. On l’imagine très populaire. Pourtant, il n’en a que faire et il se justifie avec aplomb. "Ce sont des concours comme ça qui feront en sorte que la danse contemporaine va mourir dans 25 ou 30 ans."
"Depuis des décennies que des artistes poussent les limites. Je ne crois pas que ce que l’on propose à la télévision sert vraiment mon art. On suggère au grand public que la danse va lui permettre de tout comprendre, de saisir instantanément, alors que dans certains cas, la pièce que tu vas voir va prendre deux semaines à faire son chemin dans ta tête", conclut avec ferveur celui qui entamera en septembre sa première saison à titre de danseur pour la compagnie torontoise renommée Dancemakers.