Amadeus : Un don de Dieu
Scène

Amadeus : Un don de Dieu

Le Théâtre des Gens de la place entame sa nouvelle saison avec Amadeus de Peter Shaffer. Une pièce dans laquelle la vie de Wolfgang Amadeus Mozart est racontée par son rival, le réputé Antonio Salieri.

Que ce soit le sujet ou l’auteur, il y a souvent quelque chose de classique dans les pièces montées par Patrick Lacombe. Après Antigone de Jean Cocteau et Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand, il s’attaque à Amadeus de Peter Shaffer, cette création restée plus de trois ans à l’affiche à Broadway qui inspira le film oscarisé de Milos Forman.

"Quand j’ai lu la pièce de Shaffer, j’ai trouvé que c’était intéressant parce que c’est un voyage à travers l’oeuvre de Mozart. Je ne voulais pas juste parler de sa carrière, car on en a amplement parlé et reparlé", soutient Lacombe, qui a laissé une place particulière à la musique du compositeur autrichien dans sa mise en scène. "On a une trentaine d’entrées musicales durant le spectacle. Avec Jean-Claude Lamy, on a choisi des pièces pour les accoler à des moments de la vie de Mozart. C’est un peu l’exercice que Shaffer a fait plus tard avec le film. On voulait que ce soit une expérience musicale, pas juste une expérience dramatique."

CRIER À L’INJUSTICE

Entremêlant histoire et fiction, Amadeus raconte la vie de Wolfgang Amadeus Mozart (Luc Thiffault) à travers les souvenirs d’Antonio Salieri (Luc Martel), son principal concurrent. Dès l’arrivée du prodige – un bohème et un coureur de jupons – à Vienne, le compositeur officiel de la cour se sent menacé, d’où son souhait de le faire disparaître. "Historiquement, oui, Salieri est un contemporain de Mozart. Oui, ils se sont confrontés à certains moments. Mais l’empoisonnement, le meurtre, tout ça, c’est fictif", insiste le metteur en scène. Attention, donc, de ne pas répandre la légende.

"Salieri, son vrai conflit est avec Dieu, pas avec Mozart", commente Lacombe. C’est que le compositeur a fait un pacte avec le Créateur. En échange de son aide pour écrire la plus belle musique qui soit, il lui a promis de se vouer complètement à lui. "Or, il se rend compte que Dieu l’a floué quand il voit le talent naturel de Mozart", précise Martel. " Il se demande pourquoi Dieu a placé autant de talent dans un être aussi immonde. Tandis que lui, qui a sacrifié sa vie, qui s’est engagé à être chaste et qui travaille avec acharnement, n’atteint pas ça. Il entre donc en guerre contre Dieu. Et la façon de faire payer ça à Dieu, c’est de s’attaquer à sa "créature sur terre"", reprend le metteur en scène.

Mozart ressent-il cette rivalité? "Ce qui s’est passé dans le temps entre Salieri et lui, je ne pourrais pas te le dire, commente Luc Thiffault. Dans la pièce, Mozart ne voit pas la rivalité, ou du moins ce que Salieri veut aller chercher de lui. D’ailleurs, il le dit dans le texte qu’il a de la difficulté à déceler la méchanceté de l’être humain. Il ne perçoit pas que les gens puissent le manipuler ou l’utiliser."

JALOUSIE CLASSIQUE

Si Amadeus explore le thème de la jalousie, son texte ne souffre aucunement de lourdeur. "On a une finale dramatique, mais c’est une pièce qui a beaucoup d’humour, estime Lacombe. C’est assez léger. Je l’ai lue et je l’ai même montée un peu comme si on était dans un opéra comique."

Cette légèreté est le fait des répliques pleines d’ironie que le personnage de Salieri, à la manière d’un humoriste, envoie directement au public, mais aussi de la quasi-omniprésence de la musique. "Souvent, dans une pièce, il y a de la musique, mais elle est là comme accompagnement. Alors que là, on lui parle. Il y a des répliques adressées à la musique et elle nous répond. C’est l’un des personnages", glisse Luc Martel.

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