Peter MacLeod : Homme en quarantaine
Scène

Peter MacLeod : Homme en quarantaine

Si vous pensiez qu’avec Sagesse reportée, titre de son quatrième one man show, Peter MacLeod donnerait dans la rectitude politique, détrompez-vous.

"J’ai une grosse peur de la routine", confie tout de go Peter MacLeod, à la table à laquelle Voir a convié l’humoriste beauceron pour parler de son nouveau et quatrième spectacle, Sagesse reportée. Avant d’aborder ce pour quoi nous nous sommes réunis autour d’un café, il tient à expliquer son commentaire initial. "C’est pas nécessairement une peur de la routine. C’est que la société te juge si tu n’entres pas dans une certaine catégorie. J’ai pas PEUR de tomber là-dedans parce que je ne suis pas fait comme ça; sinon je n’aurais pas fait ce que je fais en ce moment."

Cette carrière, MacLeod assure l’avoir menée avec force de caractère et entêtement tout en restant fidèle à ses valeurs. "Si j’avais tenu à être quelqu’un d’autre, j’aurais dit des blagues pour séduire un public beaucoup plus large."

C’est sans "tapes dans le dos inutiles" ni "flattage dans le sens du poil" que l’humour cru mais honnête de MacLeod s’est forgé une place bien singulière chez les Québécois humorophiles – les 700 000 billets envolés lors de ses trois premières productions le confirment. "Ça nous réconforte de voir quelqu’un dire sur la scène ce qu’on dit tout bas dans la chambre à coucher, à l’abri des jugements. Les gens n’osent pas s’exprimer dans cette espèce de société matriarcale qu’est devenu le Québec."

Sans aucun "ostie" de compromis

Aïe. Doit-on supposer que la mère, le symbole sociétal, en prend pour son rhume dans Sagesse reportée? MacLeod acquiesce: "La société matriarcale nous étouffe de plus en plus. Dans certains pays, on tue les dictateurs. Ici, on se donne encore plus de lois qui font en sorte qu’on ait de moins en moins de libertés."

On s’imagine déjà une poignée de bien-pensants grincer des dents devant de tels propos. "Dans les autres pays, on dit "Parlez-en en bien, parlez-en en mal, mais parlez-en", ici c’est "Parlez-en en bien et parlez-en pas trop". Il faut pas que tu sois trop riche, que tu sois trop populaire, parce que tu te fais rapidement recevoir. On reste pris avec cette mentalité de fond de rang."

Outre cette conversion des moeurs familiales, Sagesse reportée traite également des sempiternelles relations de couple. Pour la dernière fois, défend MacLeod. "Les relations de couple ne fonctionnent pas, laisse-t-il tomber comme une évidence comique. La seule façon pour que ça fonctionne, c’est en faisant des tas et des tas de compromis. Y a moyen d’être généreux et honnête sans toutefois "mettre de l’eau dans notre vin". Ostie que j’haïs cette expression-là!"

La sainte, la vraie

On croirait entendre Beigbeder, auteur de L’amour dure trois ans; les deux bougres auraient bien des choses à se dire. À la place, pour cette nouvelle production, MacLeod s’est entiché du personnage de Simon Templar de la série The Saint, tel qu’incarné par Roger Moore. "Dans le show, on reprend l’imagerie du justicier de 3e round [son troisième one man show], et on pousse ça un peu plus loin. Parce que Simon Templar, justicier, charmeur, ben, c’est moi", affirme l’humoriste en ajoutant incorporer l’esthétique des années 60 tant dans la scénographie que dans la mise en scène.

Du saint, MacLeod passe rapidement au sujet de sa mère, une "vraie sainte" qui, selon les dires de son fils, en aurait arraché avec mini-Peter sur les bras. Il lui accorde, dans le spectacle, un numéro hommage. "Pendant 15 ans, tu te dis: la femme de ma vie, c’est ma mère. Elle a fait tous les sacrifices imaginables pour élever un enfant hyperactif. C’est horrible. Écoute, j’appelais la police pour dire qu’il y avait un fou en motoneige. Je voulais qu’ils me pourchassent", se remémore en riant MacLeod.

Quant au titre, Sagesse reportée, que doit-on en retenir? Que l’ado va toujours jouer du coude, même après avoir passé le seuil de la quarantaine? "Ce qui me fait capoter, c’est de justifier ta crisse de vie plate en disant être plus sage. Un gars a beau dire "Moi, je bois moins qu’avant"; c’est clair, après deux bières, ça te prend trois jours à t’en remettre. C’est pas de la sagesse, c’est un changement physique. Ton corps ne suit plus. "Moi, je baise plus à gauche et à droite." Ah ouin? Tu bandes pu, c’est ça la vraie raison. Ta gueule."