La fin de la sexualité : Rires de bas étages
Scène

La fin de la sexualité : Rires de bas étages

Friand des intrigues de la Maison Blanche consommées comme un divertissement, François Létourneau a puisé dans la matière pour créer La fin de la sexualité, une pièce faussement documentaire où le sexe est au coeur des préoccupations présidentielles.

Créée sous le règne de Reagan, une cellule de recherche nommée « Projet sur la fin de la sexualité » s’attaque au fléau qui assiège la population des États-Unis, celui de la décroissance du taux de fécondité, de la densité spermatozoïdale et de l’indice de désir sexuel. Aussi farfelue qu’inspirante pour créer des situations d’un plus haut comique, la proposition permet à Létourneau de poursuivre son étude de la névrose humaine et de la psychologie de personnages désaxés déjà bien amorcée avec sa pièce Cheech et sa télésérie Les Invincibles.Ici, les politiciens américains et leurs acolytes sont ridiculisés dans l’étalage de leurs déviances sexuelles.

Ronald Regan, superbement incarné par Patrice Robitaille, est obsédé par les starlettes hollywoodiennes tandis que son conseiller à la Défense, John Poindexter, joué par Létourneau toujours habile en looser timoré, est ici un homosexuel secrètement amoureux du président. Catherine-Anne Toupin est pour sa part désopilante en perverse Première Dame des États-Unis qui s’offre une des scènes les plus salaces de cette farce subversive. Patrick Drolet excelle en Bush père découragé de sa femme qui n’en a que pour Dick Cheney au prénom dérivant si facilement vers le mot qui obsède l’homme de pouvoir incapable d’attirer les femmes. Émilie Bibeaufait quant à elle une troublante Monica Lewinsky qui avilit tous les hommes de pouvoir, mais le troisième tableau de l’ère Clinton lève moins.

Mêlant le décorum aux activités les plus triviales des politiciens, Létourneau crée un décalage qui déclenche l’hilarité, mais s’égare aussi dans la comédie plus graveleuse que grivoise. La mise en scène de Frédéric Blanchette, qui personnifie aussi François Létourneau (!), est pleine d’ingéniosité, mais la pièce s’éparpille dans une accumulation de personnages caricaturaux et d’intrigues secondaires. Aux longueurs s’ajoute une surenchère de scènes explicites qui finissent par écoeurer.

Délaissant la satire licencieuse pour la farce grossière, Létourneau, qui sait pourtant amuser la galerie, succombe au danger de l’humour primaire et répétitif à force de ne voler qu’aux plus bas étages. Rabelais, maître satiriste ayant donné dans la trivialité, savait faire de l’esprit avec le cul. Létourneau aurait gagné à s’inspirer de son rire qui élève et libère des tabous sans abrutir.