Peter Quanz : Une passion dévorante
Les Grands Ballets canadiens de Montréal ouvrent leur saison avec Rodin/Claudel, un ballet narratif tout frais sorti du studio et signé Peter Quanz.
À neuf ans, l’Ontarien Peter Quanz décida qu’il serait chorégraphe. À 32 ans, il avait déjà créé une trentaine d’oeuvres pour de grandes compagnies, dont le légendaire Ballet Kirov du Théâtre Mariinsky, et fondé sa propre compagnie, Q Dance. Et s’il ne goûtera pas sur place le plaisir de voir ses oeuvres présentées au mythique Théâtre du Bolchoï, c’est parce qu’au même moment, Rodin/Claudel sera donné en première mondiale à Montréal. "C’est plus important pour moi d’être ici parce que je réalise un vieux rêve", lance-t-il à l’occasion d’une conférence de presse qu’il s’efforce de tenir en français.
Le rêve, c’est celui de créer une oeuvre sur les amours des sculpteurs français Auguste Rodin et Camille Claudel, qui vécurent à cheval sur le 19e et le 20e siècle. Pour le réaliser, il a lu plusieurs biographies, arpenté les musées, vu le film Claudel, qui sera projeté à la Cinémathèque, et s’est nourri des points de vue des danseurs qui se sont naturellement passionnés pour le thème.
"Les Grands Ballets canadiens de Montréal sont une boîte à bijoux pour moi et entre la relation amoureuse, le drame et l’art, le sujet est très riche, commente Quanz, qui s’avoue plus touché par le destin de Claudel "qui a tout fait toute seule et créait des oeuvres plus intimes" que par celui de Rodin "qui était un gros businessman"".
Couvrant une période de 20 ans, la pièce débute par la rencontre des deux artistes et se termine par l’internement de Camille en asile psychiatrique, où elle passa les 30 dernières années de sa vie. Autour des personnages principaux, parmi lesquels on trouve la famille de Claudel et Rose Beuret, maîtresse que Rodin refusa de quitter malgré sa relation avec Camille, une douzaine de danseurs, toujours présents, incarnent tour à tour des sculptures, la glaise d’où elles émergent et l’énergie créatrice animant les artistes.
Habitué aux compositions plus abstraites, Quanz se réjouit d’avoir eu à renouveler son vocabulaire pour inscrire ce second ballet intégral à son répertoire. "J’utilise une grande palette de styles (classique, contemporain, théâtral, abstrait) et j’aime particulièrement le contraste entre les solos et le travail de groupe. Il y a par exemple une scène de vernissage où il a fallu équilibrer la présence de 27 danseurs. Maintenir une cohésion tout en dirigeant l’oeil du public prend beaucoup d’énergie. C’est très intéressant techniquement. Au final, l’idée n’est pas de créer de belles images, mais une forme qui porte l’émotion."