Paul-André Fortier et Simon Courchel : Je me souviens
Créé en collaboration avec l’artiste visuelle Betty Goodwin, le solo Bras de plomb a marqué un temps fort dans le parcours du chorégraphe-interprète Paul-André Fortier. Il le transmet aujourd’hui à Simon Courchel, danseur français établi à New York.
"Simon a une compréhension instinctive de la manière dont je mets le corps en mouvement. Il apporte donc à mon travail une résonance qui va bien au-delà de la technique et des habiletés corporelles. Dans ce cas précis, on pourrait même parler d’accomplissement artistique et de complicité de création." Tirée du communiqué présentant Bras de plomb, cette affirmation de Paul-André Fortier trouve des échos tout aussi élogieux dans le discours de Simon Courchel, brièvement rencontré en France voilà plus de 10 ans et retrouvé par hasard à New York à l’occasion de la tournée du Solo 30×30.
D’emblée, la chimie opère entre les deux artistes. Le danseur est séduit par l’approche très humaine du chorégraphe et sa façon de travailler avec des individus plutôt qu’avec des corps formatés. "Du mouvement le plus infime au plus impressionnant, c’est avant tout quelqu’un qui danse et c’est ce qui me touche de plus en plus, commente Courchel. Paul-André sait où il va, son écriture est épurée, il n’y a rien de superflu, tout s’inscrit parfaitement dans le corps et dans l’espace et on ne perd rien de l’essence de l’oeuvre. Par exemple, le rapport avec les objets conçus par Betty Goodwin est très clair."
Créée en 1993, la pièce révèle en quatre tableaux le cheminement intérieur d’un homme dans une scénographie surdimensionnée. Le travail de bras si caractéristique de la signature de Fortier s’y décline dans toutes ses nuances.
"Sa qualité de bras est passionnante, lance Courchel. C’est intéressant pour moi d’avoir à me mettre dans le corps de l’autre, car souvent, dans le travail avec les chorégraphes, on inspire la chorégraphie. Là, c’est une autre rigueur. Et c’est très étrange parce qu’il arrive que j’aie un flash où je vois Paul-André en faisant un mouvement. Alors je me dis qu’il était juste."
Avec cette première transmission d’une de ses oeuvres, Fortier rejoint le courant des pionniers de la danse contemporaine qui font revivre le patrimoine chorégraphique. "Je sens la pièce complètement actuelle, déclare Courchel, comme quand j’ai interprété le solo du Faune de Nijinski. Quand le mouvement est juste et qu’on va à l’essentiel, une oeuvre traverse le temps sans aucun souci."