Tobacco / Turcs gobeurs d’opium : Au Théâtre Léonard-Saint-Laurent
Disons-le tout de go: Tobacco est à ce jour la meilleure production des Turcs gobeurs d’opium. Donner tout le mérite de cette réussite à Normand Chouinard serait expéditif (on reconnaît bien l’ADN de la compagnie sherbrookoise dans cette sixième création), mais il est évident que, par sa mise en scène sans esbroufe, l’homme de théâtre a su raconter cette histoire d’amitié intergénérationnelle avec une clarté qui a parfois fait défaut lors des années précédentes. Malgré un univers clair-obscur, les Turcs sont accessibles comme jamais!
Pas besoin de décortiquer le texte d’André Gélineau (qui se révèle également par son jeu dans Tobacco) pour en extirper les thèmes sous-jacents. Après le choc de la rencontre entre une meute d’adolescents en révolte et un animateur de pastorale fanatique de Robin Williams (joué sans faux pas par Richard Fréchette), on passe outre au fait que ce dernier les amadoue en leur offrant du tabac; l’adulte ne leur veut que du bien. Et parce qu’il les fait parler, les écoute et les encourage, cet homme imparfait jouera un rôle bref mais significatif dans la vie de ces délinquants en quête de repères (dans son interprétation d’une adolescente en manque d’amour, Marie-Pier Labrecque est juste et bouleversante). Il faut y voir un hommage au métier d’enseignant, ainsi qu’à tous ces adultes qui savent reconnaître la sagesse en la jeunesse (là où d’autres ont perdu espoir).
Lors de la première, Tobacco a captivé son auditoire (tout en le faisant rire généreusement) par une succession de courtes scènes qui évoluent tel un cycle de dépendance. Entre les mains des Turcs, est-ce que le théâtre devient un vice? Si c’est le cas, abusez-en.
Au Théâtre Léonard-Saint-Laurent, les 20, 21, 22, 27, 28 et 29 octobre, à 20h.