Gilles Provost : Mémoire affective
Scène

Gilles Provost : Mémoire affective

Figure patriarcale dans le milieu théâtral outaouais, Gilles Provost a chapeauté l’émergence d’une dramaturgie locale qu’il s’accorde le luxe de célébrer avec Les outardes.

À peine l’entrevue entamée, Gilles Provost se lance dans un exposé-marathon au fil duquel, guidé par l’objectif de décrire la comédie dramatique dont il s’affaire à compléter la mise en scène, il dressera un portrait émotif de la région qu’il a contribué à enrichir culturellement et humainement. Les outardes, qu’abrite le Théâtre de l’Île cet automne, s’avère pour notre protagoniste une occasion de revisiter le passé de l’institution dont il a assuré la direction de son ouverture, en 1976, jusqu’en 2009, date à laquelle il a passé le flambeau à Sylvie Dufour. C’est la sincérité de cette pièce, l’une des premières à avoir résonné dans l’accueillante maison de pierre, qui a d’abord attiré Gilles Provost, qui en applaudit "les dialogues très vrais, les personnages qui ont de la misère à exprimer ce qu’ils ressentent de peur d’être ridiculisés ou incompris".

L’artiste dédie ces Outardes contemporaines à leur auteure, la dramaturge Gaby Déziel-Hupé, à qui, quelque peu avant son décès il y a deux ans, son ami Gilles Provost avait avoué son désir de ressusciter cette saga familiale pivotant autour du clan Gratton. "Le théâtre, j’aime ça quand c’est un miroir dans lequel les gens peuvent se reconnaître. Des thèmes comme le respect, l’amour, la tendresse et la confiance, c’est universel; c’est dans l’oeuvre de Gaby comme dans celle de Tchekhov", expose-t-il, avant d’ajouter: "C’est ma façon de dire "Bye bye, Gaby"."

Au cours de l’échange, un constant va-et-vient d’acteurs et de techniciens anime les loges du Théâtre de l’Île, tous interrompant leur course pour saluer "leur Gilles" qui, pour expliquer cette proximité, s’exclame: "Ce sont tous mes enfants et mes petits-enfants!" Et à l’image de la famille Gratton, la tribu Provost n’est pas exempte d’altercations ou de moqueries!

Gilles Provost travaille à la rédaction des "mémoires" du Théâtre de l’Île, un bouquin qui relatera sans doute l’astucieuse démarche au terme de laquelle l’institution a accueilli la Comédie-Française. "J’ai eu une belle vie, résume le manitou. Et elle continue."