Laurier-Station : L'héritage
Scène

Laurier-Station : L’héritage

Isabelle Hubert ne voudrait pas que le public aborde Laurier-Station en s’attendant à une seconde Robe de Gulnara. Après avoir lancé son regard au loin, elle le tourne vers l’intérieur.

Isabelle Hubert avait déjà commencé à travailler sur Laurier-Station. 1000 répliques pour dire je t’aime alors qu’elle rédigeait La robe de Gulnara (Prix de la critique 2010). Malgré leur cohabitation, les deux écritures s’avèrent toutefois très éloignées. "Je suis toujours à la recherche d’une nouvelle forme imposée par le sujet", explique-t-elle.

S’il est difficile de trouver une ligne directrice à son oeuvre, certaines constantes demeurent. "Ma façon de mêler l’humour et le drame, d’essayer de comprendre sans les juger les extrêmes de l’humanité, illustre-t-elle. La robe… portait un regard sur le monde. Là, c’est plus une introspection, l’analyse de sentiments et de comportements en lien avec un héritage."

Le désir d’explorer ce thème est né d’une prise de conscience. "Je regardais les chicanes qui accompagnent la séparation des biens après un décès en me disant que ça ne m’arriverait jamais. Mais en vieillissant, je me suis mise à éprouver de l’empathie pour les vieux mononcles que j’avais toujours trouvés mesquins."

Son projet a cependant été ralenti par la mort de sa mère. Jusqu’à ce que, après un an de blocage, cette pièce où elle souhaitait parler de la douleur du manque d’amour et des absurdités qu’elle entraîne prenne finalement forme à travers l’histoire de deux soeurs qui, peu après la mort de leur mère, se retrouvent coincées dans une chambre de motel pendant une tempête de neige.

"Le personnage de la mère est un hommage à ma mère, qui écrivait aussi des lettres de plainte pour contrer l’injustice et dans l’espoir d’avoir une prise sur le monde", confie-t-elle. L’auteure avoue également avoir été habitée par l’esprit du film Little Miss Sunshine tout au long de l’écriture. "Je me suis amusée à essayer de créer le même type de situations absurdes mais vraisemblables, pathétiques mais drôles", raconte-t-elle.

À mille lieues de La robe de Gulnara, Laurier-Station présente néanmoins une certaine parenté avec À tu et à toi. Bâtie sur du small talk, la pièce se veut elle aussi hyperréaliste. Son sous-titre met d’ailleurs en lumière l’idée "que chaque réplique prise individuellement est presque vide de sens, que seul le tout forme un portrait qu’on peut ressentir, comprendre".

Cela dit, sa volonté de pousser l’hyperréalisme encore plus loin l’a paradoxalement ramenée à la théâtralité. C’est-à-dire qu’elle se permet de "proposer un angle, de ne pas abandonner le spectateur à son interprétation de voyeur". En ressort "un spectacle personnel, autonome, différent", estime-t-elle.

Jusqu’au 26 novembre
Au Théâtre Périscope
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Laurier-Station. 1000 répliques pour dire je t’aime
d’Isabelle Hubert
Éd. L’instant scène, 2011, 120 p.