Shantala Shivalingappa : Madras-Tokyo via Wuppertal
La chorégraphe-interprète Shantala Shivalingappa nous offre le luxe d’une soirée complète de danse indienne, Gamaka, et d’un programme diversifié de solos contemporains, Namasya.
Avec une mère danseuse et enseignante, Shantala Shivalingappa est tombée très tôt dans la marmite de la danse classique indienne. Ponctuée de séjours réguliers à Madras, où elle est née, son enfance parisienne est marquée par la rythmique complexe des jeux de pieds qui caractérise les danses traditionnelles de l’Inde, de même que par les mimiques du visage et les positionnements des mains (les fameux mudras) qui codifient la narration de ses récits mythologiques. Après 10 ans de pratique du bharata natyam, l’adolescente tombe en amour avec le kuchipudi, danse du Sud, et reçoit les enseignements d’un grand maître.
Aujourd’hui reconnue pour sa grâce, sa fluidité et sa précision technique, Shivalingappa signe les chorégraphies de Gamaka. "Le spectacle est construit selon le format d’un programme classique de kuchipudi avec, en ouverture, une pièce d’invocation et de prière, suivie de la chorégraphie maîtresse, très complète, composée de danse pure et narrative, commente-t-elle. Il y a ensuite une partie concentrée sur le rythme puis une pièce sur un récit (ici, un poème sur les premiers émois amoureux d’une toute jeune fille), et enfin un final vivant et rythmique."
Et si on ne connaît pas les codes narratifs? "La forme du kuchipudi est très précise, rigoureuse, magnifique, mais le plus important est ce qu’elle véhicule. Et pour un public néophyte, l’accès à ce qui est transmis est plus immédiat car ce qui rend la danse vivante, c’est l’énergie qu’on y met et le partage des émotions qu’elle porte."
La deuxième semaine, l’artiste de 35 ans offre un programme où s’intègre la danse contemporaine, abordée de manière empirique en travaillant notamment au sein de la compagnie de Pina Bausch à Wuppertal. Namasya, qui veut dire "en hommage", est composé d’oeuvres de la chorégraphe allemande, du Japonais de Sankai Juku Ushio Amagatsu, de Shivalingappa et de sa mère, Savitry Nair.
"Les deux programmes sont complètement différents par leur vocabulaire, leur approche et le type d’énergie qui s’en dégage, précise-t-elle. Le premier est très extraverti, coloré, chaleureux. Le second est plus contemplatif et méditatif, avec des tableaux en noir et blanc."
Une merveilleuse occasion de mesurer les subtilités de l’art de l’interprétation à travers les couleurs d’une large palette chorégraphique.