Beauté, chaleur et mort : Les sentiments humains
Scène

Beauté, chaleur et mort : Les sentiments humains

Beauté, chaleur et mort ausculte les vertiges de l’intimité, la peur de la vérité et la troublante démarche au cours de laquelle le personnel devient universel. Commotion  théâtrale.

Avec Beauté, chaleur et mort, les concepteurs et interprètes Nini Bélanger et Pascal Brullemans se penchent sur la douleur que provoque le décès d’un enfant. Si l’entreprise s’ancre dans un thème délicat, la charge de l’objet est accentuée par sa forme. Plutôt que de faire appel à des comédiens, le duo s’est lui-même mis en scène, transformant l’espace de jeu en un énorme confessionnal au coeur duquel il reconstitue le récit de son propre deuil.

Nini Bélanger conçoit la vérité comme le principal moteur de sa quête artistique. "Depuis mes premiers pas en théâtre, j’ai eu envie de mettre en question le simulacre sur scène. Je comprends que le théâtre est le lieu de la fiction, mais je désire aller au-delà des simagrées, de l’exagération", révèle-t-elle.

L’intimité, ici, apparaît comme le nerf qui fait voyager cette vérité. Elle est également la source du malaise qui plane sur la pièce. "Nous ne voulions pas, car certains le font mieux que nous, pousser le malaise à l’extrême en optant pour le spectaculaire. Notre objectif était de bousculer le quatrième mur, de dire: "Ce qui se passe sur scène est humain; vous êtes des humains; vivons quelque chose ensemble"", lance Bélanger.

Le geste, subversif, s’avère un appel à la complicité visant à inclure l’auditoire dans une périlleuse aventure. La photo dudit enfant est, d’ailleurs, gaufrée dans le programme remis aux spectateurs, ce qui les conduit à tenir dans leurs mains le cliché que la procédure hospitalière incite les parents à prendre d’un enfant quand il meurt.

Alors que les premières représentations, tenues en janvier dernier à La Chapelle, à Montréal, ont suscité les éloges, Bélanger atteste le caractère casse-cou de l’oeuvre. "Quand j’ai commencé à parler du projet à quelques proches, se remémore-t-elle, un silence total s’installait, comme si j’avais dit une énormité!"

Au-delà de la gravité de sa thématique, Beauté, chaleur et mort suggère, en somme, un acte de délinquance. Bélanger s’enthousiasme: "Osons faire quelque chose que l’on ne peut pas faire. C’est bien trop dangereux de faire ça? Faisons-le! On peut en rire et en pleurer; c’est la beauté de la chose!"