Contes urbains : Où sont les bombes?
Depuis 17 ans, juste avant Noël, les Contes urbains reviennent sur les planches pour séduire ceux pour qui la satanée "magie des Fêtes" goûte la dinde périmée. Rien de tel qu’une succession d’histoires à mille lieues de Walt Disney pour célébrer cette période de l’année sur un mode très adulte.
Au fil des ans, certains contes ont marqué l’imaginaire tant par leur qualité d’écriture que par la manière dont ils étaient amenés sur scène avec sobriété, sans tambour ni trompette. Une chaise, une succession d’acteurs, des mots et deux musiciens (Eric Asswad et Charles Papasoff). Avec ce décor dépouillé, les textes doivent exploser comme des bombes et les acteurs, s’en remettre à leur instinct.
Cette année, malgré l’excellente idée de rassembler pour l’occasion des conteurs de notre enfance comme Marie Eykel de Passe-Partout, Marcel Sabourin de La Ribouldingue ou Louisette Dussault de La Souris verte, le spectacle demeure inégal, trop doucereux pour le concept qui veut faire grincer des dents, donner des frissons et pousser le public dans ses retranchements.
Il aura fallu attendre à la toute fin pour recevoir la bombe qui suscite les émois. Contrairement à la comédienne Linda Wilscam, ex-Picotine, le texte à cause duquel elle s’est désistée de la production, le jugeant trop pornographique, plusieurs l’accueilleront comme un élixir enivrant. Pas de quoi sortir outré en retrouvant le Félix de Félix et Ciboulette, le très doué Jean-François Gaudet, interpréter le texte Le licheur de Fabien Cloutier. Une fois de plus, il s’en donne à coeur joie en détaillant avec franchise les pratiques sexuelles inusitées d’un couple homosexuel. Vivement l’humour corrosif, le deuxième degré et le chemin de travers jalonné de mots que peu de gens osent prononcer à voix haute. Difficile de ne pas revoir Félix en train de taquiner Ciboulette et Noirot, le petit chien noir… Fous rires garantis.
Plus troublant que drôle, mais surtout très bien livré, avec la névrose dans l’oeil et le ton juste d’Anne Casabonne, Je les connaissais de Michel Marc Bouchard donne la parole à une voisine qui a vu… La signature de Bouchard demeure reconnaissable, comme celle de Chrystine Brouillet qui n’a pas pu s’empêcher de concocter un suspense gourmand et vicieux. Une certaine lassitude se déploie joliment à travers la fausse candeur, l’esprit malicieux et le ton de la confidence de Marie Eykel.
Si l’ensemble de l’oeuvre mise en scène par Martin Desgagné présente des acteurs expérimentés, certains d’entre eux semblent manquer de concentration, ne réussissant pas à donner du ressort au conte, ce qui rend l’expérience longuette comme un party de famille qui s’étire.
Ce n’était pas la meilleure édition des Contes urbains, mais le dernier conte sauvait le show. La 1re partie me semblait faible alors que la 2e partie me semblait plus explosive. J’ai constaté avec regret que le thème de Noël et du Jour de l’an était presque mis de côté cette année au profit de ces vedettes d’émissions pour enfants. Ils s’éloignaient aussi des rues sales et transversales de Montréal. J’aurais bien aimé que chacun de ces artistes arrive sur scène avec la photo de son personnage d’époque (Souris verte, Riboudingue, etc…)
J’en ai vu des vertes et des pas mûres aux Contes urbains depuis sa création : un acteur qui avait son texte dans ses mains, un autre qui improvisait au lieu de réciter son conte et aussi ce souffleur qui criait les mots de l’arrière vers l’avant de la salle. Malgré tout, la plupart du temps le travail est bien fait. Cette année, une comédienne a « jumpée la job » : ce sera à rajouter à ma collection de performances qui clochent. C’est probablement pour cette raison que la 2e partie ne contenait que 2 contes, sur les 6, de cette 17e édition : l’entracte me semblait mal placé.
Vous avez oublié la performance de Louisette la Souris Verte ! Les Cagoules Rouges ont frappé le public de plein fouet.
«Les Cagoules rouges» était présenté en 2e partie avec «Le licheur». Ce sont les 2 contes que j’ai préférés et tous les deux étaient présentés après l’entracte. «Je les connaissais» était aussi bien interprété par la comédienne Anne Casabonne en étant basé sur une histoire vraie. Plus d’informations sont disponibles sur mon blogue.