Belles-soeurs : Quinze femmes
Scène

Belles-soeurs : Quinze femmes

L’enthousiasme pour le spectacle musical Belles-soeurs ne diminue pas, au contraire. Entretien avec la comédienne Marie-Thérèse Fortin et le metteur en scène René Richard  Cyr.

Avant même la première de Belles-soeurs au Théâtre d’Aujourd’hui en mars 2010, ses artisans savaient qu’ils tenaient quelque chose de solide – ce théâtre musical avait après tout été créé à partir du chef-d’oeuvre de Michel Tremblay. Ils n’avaient cependant pas prévu l’intensité avec laquelle le public allait y répondre. Près de deux ans plus tard, le projet piloté par le metteur en scène René Richard Cyr et mis en musique par Daniel Bélanger a passé le cap des 100 représentations…

"Il y a un bout dont on est responsable et un bout qui touche à quelque chose d’archétypal", tente d’expliquer la comédienne Marie-Thérèse Fortin, qui incarne Germaine Lauzon, mégère du Plateau-Mont-Royal qui voit son existence complètement bouleversée après avoir gagné un million de timbres-primes. "C’est un peu un pan de l’histoire du Québec qui se retrouve sur scène. Les gens, s’ils ne l’ont pas connu, reconnaissent quelque chose qui parle d’où ils viennent, de ce matriarcat qui a été si important."

Dans Belles-soeurs, 15 femmes se réunissent pour une veillée de collage. Inévitablement, leurs discussions de cuisine s’orientent vers leur quotidien: le Québec des années 60, leur désir d’une vie meilleure, le prolétariat, le sexe. "C’est sûr qu’au moment de la création en 1968, la présence de ces 15 femmes sur scène était assez subversive. On n’avait jamais vu ça, poursuit Fortin. Le théâtre présenté majoritairement au Québec venait d’ailleurs et reflétait les moeurs d’une certaine bourgeoisie bien-pensante et catholique. C’était la première fois que quelqu’un osait montrer ces femmes-là, cette réalité sociale-là!"

LA MUSIQUE D’UNE ÉPOQUE

Mais pourquoi une adaptation musicale? "Le show est plus parti du désir que j’avais de travailler avec Daniel Bélanger sur quelque chose de musical", admet René Richard Cyr, qui a jeté aux ordures près des deux tiers du texte original pour intégrer une quinzaine de chansons. "J’avais déjà fait des spectacles musicaux et j’aimais ça. Mais plutôt que de refaire Les parapluies de Cherbourg ou La mélodie du bonheur, je me disais que ça serait le fun d’en créer un. Dans l’oeuvre des Belles-soeurs, il y avait des monologues, des choeurs. Il y avait déjà une structure qui se prêtait fort bien à une adaptation en comédie musicale."

Malgré ses 40 ans bien sonnés, la pièce de Tremblay n’était pas trop empoussiérée. Oui, elle dévoilait parfois un humour dépassé, des observations datées. Ces bémols ont heureusement été adoucis par le travail de Bélanger. "Daniel est arrivé avec un regard neuf. Il connaissait Tremblay comme tout le monde, Les belles-soeurs un petit peu. Un autre compositeur connaissant très bien Tremblay et venant du milieu du théâtre aurait peut-être été impressionné par l’oeuvre. Lui est arrivé de manière très moderne, très nord-américaine, avec des tounes qui ressemblent aux Classels, à du gospel, à du grégorien. Il n’avait pas le poids de la tradition", commente le metteur en scène.