Elise Legrand : Créature en mouvement
Scène

Elise Legrand : Créature en mouvement

La Sherbrookoise Elise Legrand présente Les créatures de Shayne Dark, in situ de danse contemporaine, gratuitement dans un musée près de chez vous.

Dans nos Cantons, ils sont nombreux à croire qu’il est préférable pour un artiste de prendre la direction d’une métropole pour y exercer son métier. Sortie du Conservatoire de danse de Montréal en 2002, Elise Legrand a pourtant fait le chemin inverse.

Enracinée à Sherbrooke depuis quelques années, elle voit sa carrière comme interprète et chorégraphe connaître un essor enviable. "Venir ici, c’était une décision émotive, mais le professionnel a suivi. Ça va quand même super bien. En 2006, j’ai laissé ma job dans un café et depuis, je surfe de contrat en contrat." Une telle affirmation, ça te déboulonne un mythe! "Ici, il y a de la place! Y a de quoi d’artistique et tout le monde se tient. Et je la trouve le fun, cette ville!"

BONNE COMBINE

Encore aujourd’hui, la danse demeure son principal moteur artistique. "J’ai commencé en ballet, et je me suis réorientée en danse contemporaine. Pour y arriver, il a vraiment fallu que je désapprenne des éléments du ballet, que je me reforme. J’ai ensuite travaillé pour plusieurs compagnies [dont des sherbrookoises comme Sursaut et Axile], et j’ai aussi fondé un collectif de création avec une autre danseuse."

Ensemble, elles ont conçu un spectacle de danse qui incluait des éléments de cirque. Cette voie fut la bonne, car l’art circassien s’est révélé la carte atout d’Elise Legrand. Sa multidisciplinarité lui a ouvert des portes qu’elle croyait cadenassées. Après avoir été de la première mouture d’Omaterra – "J’y étais comme danseuse, mais j’y faisais des choses acrobatiques." – et avoir sillonné le territoire canadien avec LaboKracBoom (du cirque de rue confectionné à huit mains), elle s’est tout récemment retrouvée sur une des scènes du Cirque du Soleil. "C’était un seul show, un événement spécial à Moscou. C’était parfait parce que je n’ai pas eu à mettre mes projets personnels de côté. Je ne sais pas si je partirais un an en tournée, avec toujours le même show." Difficile de déroger à ses passions. "Je reste fondamentalement une danseuse. Le cirque, c’est souvent spectaculaire, technique, et il faut rechercher la performance à tout prix. Moi, je préfère jouer avec les émotions, avec les mouvements."

LES CRÉATURES DE SHAYNE DARK

"Je rencontre tellement de gens ici qui n’ont jamais vu de danse contemporaine. Je me dis alors qu’il faut s’arranger pour que la danse soit plus présente. Il y a là quelque chose à faire, et ça me motive. Mon objectif est de dynamiser le milieu. Au fond, je veux juste faire connaître la danse un peu mieux", résume Elise Legrand. Conséquente, elle propose un spectacle gratuit et dans un lieu non usuel pour la danse, soit le Musée des beaux-arts de Sherbrooke. C’est ainsi que, parmi les sculptures de l’artiste canadien Shayne Dark, la danseuse se prépare à faire le don d’une chorégraphie in situ, accompagnée du danseur Simon Durocher-Gosselin.

"Je suis allée voir l’expo, et je n’avais juste pas le choix de m’en inspirer. Ça me faisait penser à des choses que j’avais explorées, en lien avec des créatures, des gestuelles plus étranges, des mouvements à moitié humains… Je vais essayer d’épouser les formes des sculptures."

Et ce projet n’est que le premier d’une série. "Mon idéal serait de créer de petites chorégraphies que je ferais régulièrement – exemple, tous les trois mois – dans des places que j’aime à Sherbrooke. Et ce serait toujours gratuit. Dans ma tête, il y en a au moins cinq, mais pour l’instant, je vais pouvoir en faire deux. Deux créations différentes. La prochaine aura lieu au mois de mai." Et elle sera sûrement extérieure.

La danse qui va à la rencontre d’un public, et non l’inverse. Avec cette médecine, Elise Legrand démocratise son art, à sa manière.