Martin Petit : Le citoyen Petit
Observateur au regard acéré d’une société qui rit parfois d’elle-même pour ne pas pleurer, Martin Petit fait le portrait de l’humour québécois en même temps qu’il propose quelques théories sur ses fondements politiques et sociaux.
"À part pour le iPhone, je ne pense pas que notre vie soit très différente de celle des Romains et je ne crois pas qu’au final, nos préoccupations sont très loin de celles d’un être humain du 14e siècle", dit Martin Petit presque tout à fait sérieusement… "Par contre, ce qui nous fait rire change très rapidement. J’adore travailler là-dedans, dans cette effervescence, parce que je suis toujours étonné de constater ce qui génère le plus de rires et de surprises. Mais le plus curieux, c’est qu’à la gang d’humoristes qu’on est dans le monde, on parvienne encore à écrire de nouvelles jokes, et qu’on puisse encore surprendre."
Une humanité prévisible, donc, mais qui serait capable de multiplier à l’infini les points de vue sur ce qu’elle est. Par exemple, la condition exceptionnelle du Québec serait en elle-même la fondation d’un humour riche et constamment novateur, avec la juste dose de tragédie nécessaire à la comédie. "On a notre humour à nous, un peu comme l’humour juif. Ou comme l’humour américain, qui ne cesse d’exorciser ses démons racistes et le clivage Noirs-Blancs, détaille Petit. Ici, on vit une situation politique tellement absurde…"
Inutile d’en remettre une couche: les humoristes sont nombreux et populaires chez nous. Mais ils sont aussi meilleurs qu’autrefois, et l’offre de plus en plus vaste.
"On est dans une période de maturité, abonde Petit. On ne fait plus de la copie des États-Unis ou de la France, on a développé une façon de faire, on a notre couleur. Il y a 20 ans, je regardais qui étaient les meilleurs humoristes, et il y avait Yvon ici, mais je regardais surtout du côté des Américains. Maintenant, les Québécois sont parmi les meilleurs."
Il poursuit: "Nous, on s’est développés avec un soutien du public. On n’a rien volé à personne, je n’ai jamais été gêné du succès des humoristes. Mais il faut soutenir les gens qui font des arts visuels, du théâtre d’avant-garde et du ballet, et c’est à nous de le faire avec nos taxes et nos impôts. Si on ne le fait pas de façon volontaire, on ne pourra pas se plaindre plus tard qu’il n’y a pas de relève en culture."
"Je sais que je suis un maillon et que je fais partie de la section privilégiée de la chaîne, conclut-il, et c’est pour ça que je suis le premier à descendre dans la rue avec ma pancarte pour défendre les intérêts des plus faibles."