Avant le lever du rideau, Marc Boudreau, directeur du Pavillon des arts et de la culture de Coaticook, a pris la parole pour témoigner qu’une programmation comporte toujours des spectacles plus importants que d’autres. Je paraphrase ses dires, mais il expliquait qu’au-delà des shows qui font courir les foules, toute bonne salle doit faire des propositions plus audacieuses, qui peuvent produire une forte impression sur le public. Pour lui, la pièce Annette était de cet ordre.

En effet, la jeune fille de Limoilou a de l’étoffe, une tout en laine, tricotée avec un amour qui peut déplacer des montagnes. Interprétée par la comédienne et auteure Anne-Marie Olivier, Annette nous a raconté l’histoire de sa mère (engrossée un soir de Saint-Jean-Baptiste) pour ensuite enfanter la sienne (qui débute un soir de Carnaval). En fait, c’est toute sa vie qui défile à grands coups de patins, car la partie se joue le jour du référendum de mai 1980, alors qu’Annette est victime d’un AVC. Son existence ne tient qu’à un brin de laine.

Dans la pièce, les liens du sang se mêlent à ceux de la question nationale, véritable toile de fond de cette mise en scène de Kevin McCoy. Malgré la filiation entre mère et fille, Annette tente de ne pas reproduire les erreurs du passé; elle sublime son existence au lieu de basculer dans le pathos. Elle est une battante, et à écouter son récit, on aimerait bien que le Québec soit un peu plus à son image.

Olivier fait preuve d’un jeu éminent. Plusieurs se seraient cassé les dents sur son texte – alambiqué et rythmé tel du spoken word -, mais l’humanité de son personnage s’avère un puissant véhicule. Épaulée sur scène par le musicien Mathieu Girard (qui interprète quelques protagonistes en plus de créer les ambiances sonores de la Basse-Ville), la comédienne livre un patchwork touchant, exalté, tricoté serré.

Annette sera de retour en Estrie le 13 mars à 20h, au Centre culturel de l’UdeS.