Les peintres du charbon : Peintres de la marge
Inspirée de l’histoire réelle de mineurs initiés à l’art, Les peintres du charbon fait d’une noble cause une pièce sentimentale et caricaturale.
L’improbable destin de mineurs anglais ayant découvert la peinture et formé l’Ashington Group, dont les oeuvres furent exposées dans un musée près de Newcastle, a inspiré à Lee Hall, auteur britannique du célèbre Billy Elliot, une pièce ambitieuse couvrant la période de production des peintres, de 1934 à 1948. Revisitant certains thèmes explorés dans cette fable sociale qui traitait déjà de la place de l’art dans le monde ouvrier à travers la vie d’un fils de mineurs devenu danseur de ballet, l’oeuvre ne possède pas sa puissance, s’égarant dans de nombreuses thèses rébarbatives sur le sens et la fonction sociale de l’art.
Le choc des mondes illustré par la rencontre de ces travailleurs de mines de charbon et du professeur d’histoire de l’art qui débarque à l’improviste dans leur petit village, sans musée ni bibliothèque, offre un beau potentiel pour une pièce historique à portée sociale, mais le piège didactique n’a pas su être évité.
Les personnages de mineurs échangent pourtant des dialogues vivants, mais aux répliques souvent comiques de ces hommes rustres qui opposent leur vision naïve au raffinement de leur professeur cultivé succèdent des passages descriptifs et plaqués sur les théories de l’art qui sonnent artificiel. La peinture ouvre aux ouvriers une fenêtre sur le monde et sur leur propre condition: ils peignent des scènes de travail dans les mines qui révèlent la dureté de leur métier, dont ils sont fiers, mais lorsqu’ils analysent leurs oeuvres en termes d’allégories, de symboles freudiens et de métaphores de l’oppression, citant Marx, ils perdent en crédibilité. Les réflexions trop savantes donnent à la pièce un caractère scolaire. Le professeur (Gabriel Sabourin) tire lui aussi quelques répliques tout droit sorties d’un cours d’histoire de l’art sur les modes de représentation, le statut de l’artiste et le rôle de l’art qui peut changer le monde. L’auteur dilue le propos, qui aurait gagné en vérité en étant moins explicatif.
Clichés et personnages caricaturaux font de cette pièce trop longue (2h40) une oeuvre redondante où les scènes se succèdent et se ressemblent dans une mise en scène sans grande originalité signée Claude Maher. Le déplacement des quatre panneaux amovibles où sont projetées les oeuvres des mineurs et de jolies images d’archives n’ajoute rien à la pièce. Normand D’Amour et Marc Beaupré sont les seuls à approfondir un peu leurs rôles de mineurs, les autres comédiens peinant à tirer la subtilité d’un texte qui en est privé.