Mathieu Gosselin : Laisser sa trace
Scène

Mathieu Gosselin : Laisser sa trace

Que se passerait-il si la nature se vengeait sur les humains? Pour souligner les 10 ans du Théâtre de la Banquette arrière, Mathieu Gosselin a imaginé dans Province des êtres en fuite qui, sans le savoir, s’apprêtent à mener l’ultime guerre de leur existence.

Ils s’appellent Amélie Bonenfant, Sophie Cadieux, Sébastien Dodge, Rose-Maïté Erkoreka, Mathieu Gosselin, Renaud Lacelle-Bourdon, Anne-Marie Levasseur, Lise Martin, Éric Paulhus et Simon Rousseau. Ils sont tous diplômés d’une même cohorte du Conservatoire d’art dramatique de Montréal. En fondant leur propre compagnie il y a une décennie, assoiffés par la même envie de poser un regard authentique, ludique et engagé sur le monde qui les entoure, ils étaient loin de se douter qu’ils allaient faire leur marque.

Depuis leur incursion théâtrale en groupe dans Les femmes de bonne humeur de Goldoni, produite en 2002 à la salle Fred-Barry, leurs voix conjuguées se sont élevées à travers des créations collectives comme Silence radio, Les mutants ou La fête sauvage, écrite par Mathieu Gosselin, qui reprend le flambeau avec Province, sur laquelle il planche depuis environ deux ans. "Ce n’est pas la suite de Fête sauvage, précise-t-il, mais il y a tout de même ce terreau d’origine, cet ailleurs. Une fois de plus, les personnages se retrouvent à l’extérieur de la ville, confrontés à eux-mêmes, face à leurs failles…"

Journal d’une disparition

Cette fois, dans une mise en scène de Benoît Vermeulen, des humains en tous genres – douchebag, obèse, endeuillé, vierge tardivement et autres – viennent raconter leur histoire alors que la nature prend le dessus sur leur espèce au bord de l’extinction. Ils sont dénaturés. "On ne soupçonne pas à quel point la Terre est capable d’autodéfense, de bien s’occuper d’elle-même…"

Malgré tout, ces êtres continuent de mener leur vie dans une bulle de superficialité, aveuglés par diverses échappatoires. "C’est une façon de s’interroger sur l’instinct de survie des humains et de tenter de comprendre comment ils laisseront une mémoire."

Or l’auteur, qui jouera auprès de ses comparses de la Banquette arrière dans Province, souligne l’humour qui réside dans ce texte, qui ne se veut surtout pas fataliste ou apocalyptique. Des percées de lumière en émanent, comme à travers le ciel québécois des derniers mois, alors que les passions se soulèvent. "Il y a un vent de changement qui me réjouit. Cette pièce tombe bien." Dans ce printemps de mobilisation, Province et ses interprètes risquent de laisser des traces.