Fabien Cloutier / Cranbourne : L'chum à Chabot aimerait aimer
Scène

Fabien Cloutier / Cranbourne : L’chum à Chabot aimerait aimer

Dans Cranbourne, son second spectacle mettant en scène le chum à Chabot, l’auteur et comédien Fabien Cloutier présente un personnage toujours aussi rough, mais désormais aux prises avec quelques grandes questions existentielles.

Ce n’est pas le succès connu par Scotstown, produit à La Licorne en 2009, premier spectacle inclassable à mi-chemin entre le conte urbain, le conte et le monologue performatif, qui a poussé Fabien Cloutier à revisiter son personnage du chum à Chabot, ce rustre bonhomme aux réflexions dérangeantes. Non, c’était plutôt que l’chum en question avait d’autres choses à vivre: "En fait, j’ai bien l’intention de faire de son histoire une sorte de triptyque", affirme Cloutier, joint à sa résidence de Québec. "Je vais laisser le temps à Cranbourne de vivre, mais peut-être que dans cinq ans, on reverra Chabot sur la scène."

Contrairement à Scotstown, Cranbourne fait vivre au personnage une remise en question. "L’chum à Chabot se rend compte que son petit monde, son village de Saint-Magloire-de-Bellechasse, là où il passe du temps à regarder une vache chier, est devenu trop petit. Il va penser à l’ailleurs, à la recherche du bonheur. Se trouver une job, une blonde; des préoccupations bien banales pour monsieur, madame Tout-le-monde. Pour Chabot, ça devient intéressant."

Et devant ce propos passé au filtre de ce joual dans lequel les sacres tiennent aussi lieu de sujets, d’adjectifs, de verbes et de compléments, le défi réside dans l’interprétation, soutient Cloutier. "Je suis méticuleux dans l’écriture. Mais je crois que c’est dans le jeu que le message passe. Je ne peux pas le jouer comme un gros con qui vient nous balancer un paquet de vulgarités. Je ne veux pas me lancer de fleurs, loin de là, il faut que ce personnage soit joué avec finesse, on doit être capable de voir l’humanité derrière cette langue qui peut rebuter à la base. Y a plein de monde qui s’expriment comme des tout croches, mais qui ne sont pas des tout croches."

Il poursuit, au sujet de la réaction habituelle du public néophyte aux élucubrations du chum à Chabot: "Y a un moment donné où l’on arrive à se dire: "J’m’en crisse que cette langue me heurte. Ce que je vois, c’est l’humain derrière. C’est la bonté." Et c’est là qu’on va reconnaître des gens autour de nous."

Dans la langue, dans les réflexions sur son existence, on pourrait facilement déceler de durs constats sur la vie québécoise, menée par un semblant de rêve américain, teinté de couleurs provinciales. Or, Cloutier affirme qu’il en va tout autrement: "Moi, j’pars pas dans l’idée de faire un portrait de société. Je voulais faire vivre à ce personnage-là des aventures. J’essaie d’être précis. Si je le place dans une usine, je me dois de décrire les gens qui l’entourent. Et ensuite, si les gens veulent appliquer cette vision à leur quotidien, ben ils le font. C’est en allant dans les émotions précises, dans les doutes, dans l’espoir et dans le besoin d’aimer et d’être aimé que ce qui se passe devient universel. Oui, c’est un portrait de la société québécoise, mais surtout, c’est un portrait de ce gars-là."

Le 6 octobre à 20h
Au cabaret La Basoche