D. Kimm / Festival Phénomena : Le festival de tous les genres
Infatigable ambassadrice des artistes de la marge, D. Kimm convertit son festival Voix d’Amériques en Phénomena après 10 ans d’existence. Bienvenue chez les créateurs excentrés.
Elle avait mis sur pied un lieu pour toutes les voix différentes du continent, réunissant francophones, anglophones et autochtones autour d’une même tribune consacrée au spoken word, à la poésie, et aux créateurs débrouillards en tous genres. Toujours bilingue et dédié à la parole libre et excentrique, Phénomena invite désormais toutes les disciplines, créations insolites et artisanales aux budgets modestes qui transgressent les normes et nous sortent de notre zone de confort. "Après dix ans, on avait besoin d’évoluer, explique la directrice du festival. J’avais l’impression qu’on avait fait le tour du jardin. La mouvance autour du spoken word et de l’oralité a beaucoup bougé et il y a moins d’artistes. En plus, il n’y a pas de compagnie qui monte des spectacles, il fallait qu’on les monte tous."
D. Kimm et son équipe de Filles électriques ont donc fait un appel de projets ouvert à toutes les disciplines et un nouveau réseau d’artistes s’est formé. Certains classiques resteront en place, comme le 8e Combat contre la langue de bois, animé cette année par JF Nadeau qui invite les Gabriel Nadeau-Dubois et Gilles Proulx à parler sans censure, le Shift de nuit (des micros ouverts animés tous les soirs par Pascal-Angelo Fioramore), et des 5 à 7 gratuits, dont un hommage à Ève Cournoyer. La danse trouve une place plus importante dans la nouvelle formule, avec un solo de l’extraordinaire Carol Prieur (La neige bleue) et une performance de Line Nault (Attachée: L’amour de la femme amour). Mais avec son nouveau nom qui fait référence à l’anormalité, le festival affirme cette année son goût avoué pour le bidouillage et le paranormal, proposant une conférence sur les Phénomènes inexpliqués. "On offre différentes conférences sur le magnétisme et l’hypnose, avec un duo de chasseurs de fantômes, un capitaine qui nous explique quoi faire en cas de rencontre avec un extraterrestre (Larissa Corriveau) et un spécialiste du voyage astral (Antoine Laprise). C’est humoristique, mais pas grotesque. On est documenté", précise D. Kimm.
Le clou du festival est cette invitée d’honneur qui incarne et raconte à elle seule l’histoire de l’art underground. L’artiste new-yorkaise transsexuelle Genesis Breyer P-Orridge est la leader des groupes de rock industriel Throbbing Gristle et Psychic TV, artiste visuelle provocatrice et inventrice de la pandrogynie, qui l’a fait fusionner avec son amoureuse Lady Jaye, une dominatrice SM réputée à New York, aujourd’hui décédée. L’artiste d’origine anglaise présente un spectacle de musique et de spoken word, mais une exposition de ses collages (avec comme commissaire Mathieu Beauséjour) et un documentaire sur sa vie signé Marie Losier sont aussi au programme. "Ce n’est pas pour tout le monde et son art visuel est très provocateur, mais j’aime les artistes qui s’assument, vont au bout de leurs affaires et ne s’excusent pas", précise D. Kimm. L’artiste subversive a de quoi attirer l’oeil des curieux.
Autre incontournable rapatrié à Phénomena, le Cabaret désir dada revient cette année sous la direction de Claude Poissant, entouré, entre autres, de Francis Ducharme, Violette Chauveau et Manu Roque. En hommage à ce mouvement surréaliste et révolutionnaire qui fit voler en éclats toutes les conventions, la soirée promet "la mesure et la démesure, la transformation et la mutation, ces instants de grâce où tous vos désirs sont désordre". Bon festival!
Du 19 au 26 octobre
www.festivalphenomena.com
Maryse Poulin présentait Panorama dans le cadre du Festival Phénomena, en association avec Tangente. C’était surtout un spectacle sons et lumières qui nous en a mis plein la vue, durant environ 60 minutes, dans la petite salle Sala Rossa, pour une unique représentation. J’ai particulièrement aimé les projections couleur sur un écran formé de plumes blanches.
Il y avait aussi l’utilisation d’instruments de musique (flûte, guitare, contrebasse et synthétiseur) manipulés d’une façon pas toujours conventionnelle. Une tambourine servait d’écran de projection ou lorsqu’inversée servait pour faire de petites ombres chinoises : c’était vraiment songé. Il y a aussi quelques pas de danse, mais rien de très convainquant. La trame musicale était très intéressante et accompagnait les mots de cette artiste. Les spectateurs étaient nombreux et les tables placées dans un style cabaret.