Maryse Lapierre / L’hiver dedans : Les voisins
Lauréate de la bourse Première Oeuvre du volet théâtre de Première Ovation, Maryse Lapierre ouvre la porte d’intérieurs humains en phase de reconstruction avec sa pièce L’hiver dedans.
Fébrile, Maryse Lapierre toise l’enregistreuse sur la table devant elle: manifestation tangible que ses premiers texte et mise en scène seront soumis au public d’ici quelques jours. La preuve, les journaux commencent à en parler.
"Ça fait longtemps que je trimbale cette pièce", dit-elle avant d’entreprendre la longue genèse de L’hiver dedans: récit de solitudes qui convergent le temps d’une interminable tempête de neige, chronique d’une époque en manque de repères spirituels et humanistes où les personnages se confient au public dans une désarmante intimité qui renvoie aux petites plaies universelles.
Une histoire de voisins aux destins croisés, à l’époque où cette proximité se résume le plus souvent à quelques politesses de surface. "Moi non plus, je ne parle pas beaucoup à mes voisins", déplore celle qui cumule une dizaine d’années comme comédienne et quelques expériences d’écriture collective. Pourtant, c’est une rencontre avec une artiste en arts visuels qui vit au-dessus de chez elle qui alimentera l’écriture de L’hiver dedans. "On n’était pas vraiment amies, mais ça avait cliqué entre elle et moi, une sorte de communion d’esprit si tu veux, et je me suis mise à m’inspirer d’elle pour écrire. Au bout de quelques semaines, j’ai dû lui avouer qu’elle me servait de modèle." L’artiste, Geneviève Lapierre, dont les tableaux font partie du décor de L’hiver dedans, a ensuite participé aux nombreux laboratoires pour ce texte récompensé par le prix Première Oeuvre de Première Ovation.
Amours perdus, deuils, incommunicabilité, repli sur soi comme rempart devant la douleur sont au coeur des propos que tiennent les personnages interprétés par Frédérick Bouffard, Jonathan Gagnon, Marie-Ginette Guay et Catherine Hughes. "Mais, précise l’auteure et metteure en scène, pour moi, le théâtre, c’est l’espace de la poésie, alors tout au long, il y a ce flou entre la réalité et le monde du rêve." Un léger voile, un décalage vaporeux pour que la douleur de vivre se dépose avec grâce sur l’auditoire plutôt que de lui lacérer le coeur.
Maryse Lapierre se penche à nouveau vers l’enregistreuse, ses mots s’y alignent à mesure qu’elle énumère ses envies, sa nostalgie d’un collectif qui partage ses maux autour d’une bière ou d’une corde à linge. L’hiver dedans, c’est le portrait d’une société qui a fermé sa porte, voudrait l’ouvrir, mais a oublié comment.
Du 20 novembre au 8 décembre
À Premier Acte