Olivier Letellier / La scaphandrière : Letellier et ses jouets
Scène

Olivier Letellier / La scaphandrière : Letellier et ses jouets

Olivier Letellier débarque au Théâtre français du Centre national des Arts avec La scaphandrière, un spectacle tous publics à la facture visuelle résolument contemporaine.

Olivier Letellier sera, dès janvier 2013, en résidence d’artiste associé à la Maison des arts de Thonon-Evian à Thonon-les-Bains, en France. D’ici là, il fera un arrêt à Ottawa pour y présenter sa dernière mise en scène, une pièce onirique signée Daniel Danis. Le conte se concentre sur le personnage de Pierre, qui, pour renverser le destin tragique qui s’abat sur sa famille, risque un périple sur le dangereux lac Moloch, déterminé à secourir sa soeur.

Voir: La scaphandrière n’est pas votre première expérience avec le théâtre tous publics. Qu’avez-vous appris sur l’art de conter une histoire dans un contexte où cette dernière doit résonner autant auprès des adultes que des enfants?

Olivier Letellier: "Quand j’ai contacté Daniel Danis et que la commande de texte s’est concrétisée, il m’a mentionné que la nature du public ne changeait rien à l’écriture, mis à part qu’il devait y avoir de la lumière à la fin de l’histoire. Rythmiquement, j’ai travaillé pour faire en sorte que le spectacle plaise à un jeune public – jeune de par son âge ou de par son âge de spectateur. Ce que je veux dire, en fait, c’est que la pièce devait pouvoir parler aux individus qui n’ont pas l’habitude de se rendre au théâtre et dont la vie est gérée par la cadence du zapping et de l’Internet. Le rythme a changé, donc, mais également les thèmes et la façon de les aborder."

Voir: À ce propos, Daniel Danis est reconnu pour la poésie de sa dramaturgie. Comment traitez-vous, à travers cette poésie, de thèmes durs?

OL: "La pièce comprend plusieurs niveaux de lecture. Certains des thèmes, comme la mort ou la dépendance, font d’abord peur aux adultes, mais ils se rendent vite compte que les jeunes se concentrent sur un aspect qui transcende le récit: l’amour fraternel. Les adolescents ont tendance à s’identifier à Pierre, eux qui ne sont pas épargnés par les malheurs et accidents de la vie. Ils se reconnaissent dans la conviction avec laquelle Pierre s’accroche à ses rêves."

Voir: Par quels moyens évitez-vous que par la présence d’un seul conteur (Julien Frégé) sur scène, la pièce prenne la forme d’un long et statique monologue?

OL: "Eh bien, on a plein de jouets! Je suis un grand enfant. Nous utilisons une technologie vidéo que je ne connaissais pas et que j’ai dû apprivoiser. Quatre-vingt-dix pour cent des images sont créées en direct. Le système est complexe, mais la réception est simple pour le spectateur."

Voir: Y a-t-il un danger à faire appel à un appareil technologique si imposant dans l’enceinte du théâtre?

OL: "Certainement. Au départ, j’étais habité par la peur qu’on se perde dans ce dispositif, qu’il empêche le spectateur d’accéder au récit. Au contraire, il aide le public à se plonger dans l’univers imagé de Daniel. Par exemple, dans une scène d’engueulade, le conteur personnifie la mère avec ses mains et, projetée ailleurs dans le décor, la soeur avec son visage. Il ne transmet pas la voix, mais les intentions. C’est un code que nous dévoilons petit à petit pour que les spectateurs se sentent toujours inclus."

Voir: En octobre, La scaphandrière a été présentée au Théâtre national de Chaillot, à Paris. Cet été, la présélection du texte pour le prix Sony Labou Transi des lycéens a été annoncée. Comment jugez-vous l’accueil obtenu par l’oeuvre jusqu’ici?

OL: "Excellent! Les foules étaient denses à Chaillot – des professionnels, des journalistes, mais aussi plusieurs familles. Au départ, je craignais que les enfants de sept ou huit ans soient troublés par les thèmes. Pourtant, au moment où ces thèmes deviennent insupportables, les enfants adoptent le virage poétique et fantastique que suggère la pièce. C’est plein d’humour et les enfants l’apprécient. Quant au prix, qui, précisons-le, souligne la qualité du texte de Daniel, il incitera peut-être les diffuseurs à oser programmer une pièce qui sort du cadre auquel nous a habitués le théâtre tous publics!"

Du 28 novembre au 2 décembre
Au Théâtre français du Centre national des Arts