Queen KA : Il était une fois
Scène

Queen KA : Il était une fois

Après avoir collaboré avec Grand Corps Malade, Abd Al Malik et Samian, la slameuse Queen KA monte enfin sur le trône et emmène sa cour au Palais.

De sa cuisine inondée d’un soleil plutôt chaud en cette période pré-apocalyptique de la frénésie commerciale des Fêtes, Elkahna Talbi, alias Queen KA, me fait généreusement la conversation. Je l’imagine, au bout du fil, arpenter son appartement à coups de grands gestes théâtraux. Ou assise à sa table de travail, crayon à la main, à quelques vers d’une imminente prose. "Je ne me considère pas poétesse parce que je n’ai pas publié de recueil de poèmes, dit-elle avec retenue. Artiste de spoken word me va mieux, parce que je fais mon art sur scène, alors qu’un poète qui publie n’a pas nécessairement envie de rencontrer les gens qui le lisent. C’est un autre rapport."

Jeune trentenaire d’origine berbère, enfant d’immigrants d’Afrique du Nord née à Montréal, c’est à 12 ans que la poésie s’installe doucement dans sa vie: son professeur de théâtre de l’époque lui enseigne les fondements de l’écriture et de l’oralité poétiques. "J’ai vraiment commencé à apprendre à jouer à travers la poésie, en apprenant des poèmes, explique Talbi. Pour moi, interpréter un poème sur une scène, ce n’est pas weird."

Adolescente, l’écriture est son exutoire. "Je suis profondément timide et gênée. Le fait d’avoir fait du théâtre, d’être en public me permet maintenant de passer par-dessus ça. Sauf qu’il reste que souvent, pour les choses que j’ai besoin d’exprimer réellement, je n’y arrive pas. C’est pour ça que mes textes traduisent un besoin de m’exprimer sur quelque chose, ça sort souvent en gros jets, comme RRRAAAAAH! Après, je les travaille, mais sur le moment, c’est: "Faut que j’écrive ça, sinon je pète une coche!"" s’écrie-t-elle avant de pouffer de rire.

Après des études universitaires en art dramatique, Elkahna découvre la scène slam, en Europe et ensuite à Montréal. Et elle tombe sous le charme. "L’auteure en moi tripe beaucoup, car c’est moi qui écris les textes. Il y a quelque chose de profondément valorisant à mettre au monde un objet artistique du début à la fin. C’est moi qui l’écris, c’est moi qui l’interprète donc, il y a une liberté assez exceptionnelle là-dedans. Je peux parler de ce que je veux. Le métier de comédienne est magnifique aussi, mais il n’a pas cette liberté-là."

On peut d’ailleurs la voir dans la pièce II (deux) de Jean Marc Dalpé (présentée à l’Anglicane le 24 novembre), dans le rôle d’une musulmane, femme d’un policier blanc. Mais c’est dans les habits de Queen KA qu’elle et ses musiciens, Blaise Borboën-Léonard et Stéphane Leclerc, viennent présenter Ceci n’est pas du slam, mis en scène par Yann Perreau et réalisé entre autres par DJ Champion. Un spectacle qu’elle décrit comme un "objet poétique et onirique": "C’est le genre de show où tu t’assois sur ta chaise, pis tu écoutes. Y a des poèmes, y a des mots, y a des images mais y a aussi de la musique. C’est vraiment un voyage dans mon univers; je te prends par la main, après je te donne deux, trois claques… Je ne fais pas de jokes après chaque texte, l’aspect théâtral fait que je vous laisse embarquer dans le truc, pis on jasera après."

Le 23 novembre
Au Palais Montcalm