La critique ayant elle-même pratiqué le patinage artistique durant 16 ans, ce spectacle a eu l’effet d’une réconciliation avec un sport engoncé dans une esthétique formellement limitée, qui explose ici dans toute sa diversité. Exploitant le potentiel de la glace dans de superbes tableaux (le premier, illustrant l’évolution du mouvement sur glace de la simple glisse jusqu’à son développement en geste artistique, est particulièrement réussi), les trois excellents patineurs (Alexandre Hamel, Tailor Dilley, Samory Ba) forment un trio en cure de désintoxication invité à rejoindre la normalité. Bien que l’histoire ne soit pas toujours claire, le spectacle bout d’une énergie et d’une créativité communicatives, osant le mélange des genres, d’un moonwalk de Michael Jackson à des mouvements trash sur musique métallique, en passant par du violoncelle live sur glace (Jasmin Boivin) et une danse romantique italienne en sous-vêtements. Osant tout, dans l’irrévérence comme dans l’humour, sans lésiner sur la virtuosité, Patineurs anonymes fait éclater une discipline jusqu’ici boudée par l’art et signe sa renaissance. Chapeau à ces nouveaux visages de la création contemporaine!